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« Prêt d’argent » et compte courant

Dans de précédents articles IDEFISC, nous revenions sur la notion de « prêt d’argent » visée à l’article 18, alinéa 1er, 4° du CIR 1992, requalifiant en dividendes certains intérêts d’avances, dans les conditions déterminées par cet article.

Par un arrêt du 16 novembre 2006, la Cour de cassation a pour la première fois pris position en la matière.

L’affaire concernait une société ayant acheté à son principal actionnaire un immeuble et ses avoirs incorporels, par un contrat prévoyant qu’une partie seulement du prix de vente serait payée, le solde faisant l’objet d’une convention de mise à disposition par l’actionnaire au profit de la société, moyennant paiement d’un intérêt de 7% l’an.

L’administration fiscale avait alors appliqué la disposition précitée, estimant qu’il y allait d’un « prêt d’argent » donnant lieu à requalification d’une partie des intérêts en dividendes.

Pour rappel, l’article 18, alinéa 1er, 4° du CIR 1992 établit un régime de requalification des intérêts en dividendes lorsqu’ils sont versés en rémunération d’avances, consenties par des dirigeants d’entreprise ou des actionnaires.

Depuis l’entrée en vigueur de l’arrêté royal du 20 décembre 1996, cet article n’est plus applicable qu’aux avances consenties sous forme de « prêts d’argent représentés ou non par des titres ».

La société contestait le fait qu’il y avait en l’espèce un « prêt d’argent », prétendant qu’il s’agissait d’une simple « inscription en compte courant ».

La Cour d’appel de Liège avait ensuite décidé que la requalification des intérêts en dividendes avait été effectuée à tort, estimant à cet égard que l’article 18, alinéa 1er, 4° du CIR 1992 était un « texte clair », qui s’imposait, en sa lettre, à l’administration fiscale de sorte que les termes « prêt d’argent » ne pouvaient, à défaut de disposition fiscale spécifique, être étendus aux opérations réalisées dans le cadre d’un compte courant.

La Cour d’appel de Liège motivait également sa décision par le fait que la notion de « prêt d’argent », à défaut de définition propre, ne pouvait être entendue que dans le sens donné par le droit commun, sous peine de créer une situation d’insécurité juridique des opérations économiques.

L’administration fiscale introduisit dès lors un pourvoi devant la Cour de cassation, en fondant celui-ci sur le fait que les termes « prêt d’argent » figurant à l’article 18 du CIR 1992 ne limitent pas l’application de cette disposition légale au seul contrat de prêt réglé par le droit commun et visé par le Code civil. Revenant sur une jurisprudence progressivement établie en faveur de l’interprétation restrictive de cette notion et s’opposant ainsi à la position doctrinale majoritaire sur la question, la Cour de cassation, par son arrêt du 16 novembre dernier, a précisé que les termes « prêt d’argent », visés par l’article 18 du CIR 1992 peuvent revêtir la forme d’une inscription au compte courant de l’actionnaire ou de la personne qui exerce un mandat ou des fonctions qui y sont visées.

La plus grande prudence s’impose dès lors désormais lorsqu’un actionnaire - ou un administrateur - conclut un contrat ou une opération avec la société dont il détient des titres – ou dans laquelle il exerce un mandat - et plus spécifiquement si cette opération implique une inscription au compte courant de l’actionnaire ou administrateur concerné.

L’administration fiscale ne manquera pas d’utiliser l’arrêt du 16 novembre 2006 pour imposer les intérêts issus de ces inscriptions en compte courant.

Il ne peut dès lors qu’être conseillé aux parties concernées par ce type d’opération de veiller, d’initiative, à restructurer les relations concernées.

Auteur : Melanie Daube

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