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Les Holdings 29 luxembourgeois: un horizon réellement limité

La Commission européenne a, par sa décision du 19 juillet 2006, condamné les sociétés holdings luxembourgeoises bénéficiant des dispositions de la loi du 31 juillet 1929 en raison du statut fiscal privilégié dont elles bénéficient. Le régime d’exemption fiscale de leurs revenus (ainsi que de la distribution de ceux-ci) constituerait une aide étatique incompatibleavec le Marché commun.

Sont exclusivement visées les sociétés dites holding 1929 et non les sociétés financières soumises au régime fiscal de droit commun, plus communément appelées « SOPARFI ».

Cette décision publiée dans le Journal Officiel luxembourgeois, le Mémorial, en date du 31 juillet 2006 prévoit que le régime des holdings 1929 doit être aboli au plus tard avant le 31 décembre 2006 mais qu’il pourrait continuer à s’appliquer aux sociétés préexistantes, et ce jusqu’au 31 décembre 2010, sous réserve que leur capital ne fasse l’objet d’aucune cession totale ou partielle.

Un premier pas important a déjà et rapidement été franchi avec la rédaction d’un avant projet de loi visant à instaurer la «Société d’investissement privée (« SIP »)» et apportant les clarifications requises quant au régime applicable aux holdings 1929 existant pendant la période transitoire.

Bien évidemment des modifications peuvent toujours être apportées avant son adoption par la chambre de députés. Le texte actuellement en cours d’examen par le Ministre des finances ne devrait toutefois pas subir de modification fondamentale. L’insécurité juridique régnant à ce jour en la matière devrait être dès lors être de courte durée.

1. Les éléments saillants de l’avant projet sont comme suit :

  • les lois, arrêtés et règlements grand-ducaux régissant les holdings 1929 sont abrogés à compter du 1er janvier 2007.
  • Les holdings 1929 bénéficiant des dispositions de la loi du 31 juillet 2006 avant la date du 20 juillet 2006 pourront conserver le bénéfice des dites dispositions jusqu’au 31 décembre 2006, aux conditions exposées ci-dessous.
  • Un nouveau type de société est promulgué, la Société d’Investissement Privée « SIP » qui est nécessairement :
    (i) une sociétéde capitaux (par opposition àune société de personnes)
    (ii)dont l’objet exclusif est l’acquisition,la détention, la gestion etla réalisation d’instruments fi-nanciers de tout type ( actions,parts de sociétés et d’OPC,obligations et autres titres de créance, certificats de dépôt, bons de caisse, effets de commerce, warrants, options, créances titrisées, etc, tels que visés par la loi du 5 août 2005 sur les contrats de garantie financière) et les espèces et avoirs de quelque nature que ce soit,
    (iii) qui réserve ses actions ou parts à des personnes physiques agissant dans le cadre de la gestion de leur patrimoine privé ou à toute entité agissant dans le but exclusif de ce type de personnes (trusts, fondations…)
    (iv) dont l’actionnariat est limité à  un cercle restreint d’investisseurs, excluant tout placement public ou cotation en bourse (v) dont les statuts contiennent une référence explicite à la loi SIP.
  • Par rapport à un holding 1929, la SIP est donc réservée aux personnes physiques et agit dans un cadre strictement patrimonial à l’exclusion de toute activité à caractère commercial. En conséquence, elle se trouverait exclue du champ d’application de la prohibition des aides étatiques au sens de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes selon les rédacteurs de l’avant projet de loi. Certaines activités ne sont plus autorisées (financement intragroupe, détention de droits de propriété industrielle…). Comme sous le régime holding 29 la détention de participations reste parfaitement permise et doit être opérée de manière passive, sans immixtion dans l’activité et la gestion des filiales.

  • Par contre, certaines activités prohibées pour un holding 1929 (détention de « nouveaux instruments financiers », tels les produits structurés et/ou dérivés…) ou autorisées à titre accessoire (détention de métaux d’investissement, tels l’or, l’argent…) sont autorisées dans le cadre de la loi SIP sans condition

2. Le régime fiscal des SIP

La SIP bénéficie du même régime fiscal que le holding 1929, à savoir une exonération fiscale des revenus ainsi que des distributions. Le taux de la taxe d’abonnement est identique (0.2%), l’assiette en est simplifiée puisqu’elle ne se compose plus que du capital social augmenté des primes d’émission et le ratio d’endettement fonds propres / dettes de toute nature est désormais de 1 / 10. En conséquence, seule la fraction des dettes excédant le décuple des fonds propres est réintégrée dans la base de la taxe d’abonnement, calculée prorata temporis du nombre de jours durant laquelle la société a existé. Cette taxe d’abonnement est désormais npayable annuellement.

Les SIP restent soumises à la tutelle de l’administration de l’enregistrement et exclues du béné- fice des directives européennes visant la fiscalité directe ainsi que des conventions fiscales préventives de double imposition conclues par le Luxembourg, en ce compris des clauses d’assistance inter étatiques susceptibles d’être incluses dans ces mêmes conventions. Les intérêts payés à des personnes physiques résidentes d’un autre Etat membre de l’Union européenne et de certains états tiers rentrent dans le champ d’application de la retenue à la source prévue par la loi du 21 juin 2005 transposant la directive 2003/48/ CE (directive « Epargne »),- encore qu’il soit possible d’en minimiser la portée.

3. Le holding 1929 constitué avant le 20 juillet 2006 pendant la période transitoire

La législation en vigueur, issue de la loi du 31 juillet 1929 et des différents arrêtés et règlement grand-ducaux d’application, est maintenue. Il est rappelé que la loi du 21 juin 2005 exclut du régime d’exemption fiscale prévu par la loi de 1929 toute société qui perçoit au moins 5 pour cent de ses dividendes pour l’exercice concerné, de participations dans des sociétés non résidentes qui ne sont pas soumises à un impôt comparable à l’impôt sur le revenu des collectivités luxembourgeois, soit à un taux actuellement de 11%.

La condition posée par la Commission quant à la prohibition de cessions des parts sociales pendant la période transitoire qui a commencé à courir le 20 juillet 2006 a été reprise dans le projet SIP qui prévoit le retrait du béné- fice de ces dispositions transitoires si
(i) les actions ou parts représentant la majorité des droits de vote du holding 1929 sont cédées durant la période transitoire et (ii) la cession (ou l’acquisition) n’est pas opérée pour des raisons légitimes.

Ces dispositions ont été adoptées en considération de la diversité de situations en cause, un holding 1929 pouvant certes être détenu de façon (quasi) majoritaire par un actionnaire unique, mais aussi par une pluralité d’actionnaires divers et, dans certains cas, être coté en bourse. Une prohibition stricte aboutissant à une incessibilité se serait avérée fort néfaste dans certaines de ces hypothèses et aurait pu conduire à des situations de chantage à la cession de la part d’actionnaires (minoritaires) visant ainsi à l’obtention d’avantages indus en contrepartie du maintien du bénéfice des dispositions transitoires.

Aux voeux des rédacteurs du projet SIP, une prise de contrôle d’un holding 1929 coté, une réorganisation intragroupe (dans la  mesure où le contrôle ultime reste inchangé) ou un changement de contrôle dans un cadre successoral, matrimonial ou patrimonial ne remettraient pas en cause le statut fiscal d’un holding 1929 pendant la période transitoire.

La cession d’actions de holding 29 est dès lors prohibée et une attestation du maintien du droit au bénéfice de la mesure transitoire devra être annexée à la déclaration de la taxe d’abonnement par le domiciliataire (avocat ou autre professionnel réglementé).

En tout état de cause, un holding 1929 peut être liquidé sans remise en cause de son statut d’exonération fiscale et en exonération d’imposition au titre de boni de liquidation, il peut être converti en SIP, ce qui peut se faire par acte sous seing privé, ou encore en SOPARFI et ce à tout moment jusqu’au 31 décembre 2010. On ne saurait toutefois assez conseiller de ne pas attendre avant d’examiner soigneusement chaque situation.

Serge TABERY

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