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Editorial : Sécurité juridique ?

En matière fiscale, autant sinon plus que dans d’autres domaines, la sécurité juridique est un droit essentiel du citoyen. Si l’Etat a le pouvoir d’établir les règles qui lui permettent de lever l’impôt, il faut à tout le moins que le contribuable puisse en connaître la portée en temps utile.

Par touches successives, la jurisprudence essaie, avec beaucoup de lenteur et parfois des incohérences, de protéger ce droit essentiel, mais non explicitement garanti par la Constitution. On connaît les vicissitudes qu’a connues la notion de « principe de bonne administration », consacré par la Cour de cassation pour être ensuite vidée d’une bonne partie de sa substance, par la même juridiction, qui fait céder ce principe devant celui, certes essentiel aussi, de la légalité. Comme la sécurité juridique est un élément du principe de bonne administration, notre haute juridiction décide régulièrement que l’application des règles protégeant la sécurité juridique ne peut permettre de déroger à la loi.

Plusieurs études doctrinales ont toutefois relevé que le principe de sécurité juridique n’était pas qu’un principe général de droit propre au droit belge, mais que c’était aussi une règle fondamentale de droit européen, qui a primauté sur la loi belge, non seulement pour les impôts régis par le droit européen, comme la TVA, mais aussi pour tout autre impôt. Un impôt est en effet nécessairement une restriction au droit de propriété garanti par les Traités.

Aujourd’hui, c’est la Cour Européenne des Droits de L’Homme qui, certes avec prudence, consacre ce même droit à la sécurité juridique dans le domaine fiscal, à propos d’une affaire concernant l’Ukraine.

Le contraste est saisissant. D’une part, les juristes, d’abord en doctrine, puis en jurisprudence, s’efforcent de protéger le contribuable en lui garantissant la sécurité juridique. D’autre part, le législateur, qui hésite de moins en moins à voter des lois rétroactives, même en matière fiscale, ou à les voter en fin d’exercice, tente par tous les moyens, et parfois au mépris du principe de la légalité de l’impôt garanti par l’article 170 de la Constitution, de restreindre la sécurité juridique aux seuls « rulings ». Le moyen le plus certain pour essayer de contraindre le contribuable d’y recourir est l’obscurité de la loi. Une autre méthode pour mettre en cause la sécurité juridique serait de tenter de porter atteinte au « principe du libre choix de la voie la moins imposée », en le remplaçant par des règles d’abus de droit qui seront nécessairement floues et auront comme objectif d’empêcher le contribuable de connaître avec certitude le sort fiscal qui l’attend.

Auteur : Thierry Afschrift

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