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Quand la Commission d’enquête aime la délation

La Commission parlementaire d’enquête sur la fraude fiscale a produit un travail qui, sur de nombreux aspects, est d’une rare médiocrité. Ce n’est pas une nouveauté en matière de travail parlementaire.

Mal inspirée par un petit nombre de fonctionnaires extrémistes - les seuls qu’elle ait daigné entendre -, elle s’en prend, par plusieurs recommandations, particulièrement aux conseillers des contribuables, qui sont évidemment les principaux adversaires de ces mêmes fonctionnaires lorsqu’ils outrepassent leur fonction.

Ainsi, une mesure proposée, à titre de recommandation, par la Commission, est d’obliger les conseillers des contribuables, y compris les avocats ( !) à « collaborer à la lutte contre la fraude en instaurant des règles de rapportage (obligation d’informer les autorités par exemple quand leurs clients mettent en place des constructions fiscales dans un paradis fiscal et en les obligeant à dénoncer la fraude fiscale et organisée auprès de la CETIF » (Recommandation n° 48).

Les autorités aiment beaucoup la délation, ces derniers temps, notamment en matière de fraude fiscale.

La Commission doit toutefois être particulièrement mal informée puisqu’elle paraît ignorer superbement l’arrêt rendu par la Cour constitutionnelle, le 23 janvier 2008, qui, même en matière de blanchiment d’argent, censure toute mesure qui obligerait les avocats, non seulement dans le cadre de leur activité de défenseur, mais aussi dans celle de conseiller, à dénoncer leurs clients. Le Conseil d’Etat de France s’est d’ailleurs prononcé récemment dans le même sens.

Ce qui vaut en matière de blanchiment, doit évidemment prévaloir encore bien plus pour des opérations de nature fiscale.

Il serait non seulement déraisonnable, mais contraire à la Constitution et aux engagements de la Belgique en matière de droits de l’homme, d’obliger des avocats à dénoncer leurs clients, et à en faire des « rapporteurs » comme le recommande, en toutes lettres, la Commission.

Si le législateur devait suivre ces recommandations, il ne pourrait se heurter qu’à une annulation par la Cour constitutionnelle, et à une condamnation par la Cour Européenne des Droits de l’Homme. On peut par ailleurs difficilement imaginer que, quel que soit le texte voté, un avocat digne de ce nom s’incline devant une législation qui suivrait une recommandation aussi « scélérate ». Ce dernier terme, est celui qu’avait choisi, à juste titre, un ancien bâtonnier de Bruxelles pour stigmatiser les velléités d’obliger les avocats à dénoncer leurs clients en matière de blanchiment, ce qu’écarta précisément l’arrêt cité ci-dessus de la Cour constitutionnelle.

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