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Perception de loyers et réalisation de plus-value immobilières : quelle qualification leur apporter ?

Deux époux commerçants (marchands ambulants d’articles de textile) étaient propriétaires de plusieurs biens immobiliers pour lesquels ils percevaient des loyers. Ces époux avaient également cédé certains bien immobiliers, réalisant de ce fait des plus-values.

Outre leur maison d’habitation, que les époux habitaient encore au jour du litige, ceux-ci avaient acquis quatre autres maisons, dont l’une en indivision à concurrence de 50%, un immeuble et deux flats d’étudiants entre les années 1989 et 1993.

Trois des maisons, respectivement acquises en 1989 et 1990, avaient été cédées, en 1993, 1994 et 1995, soit 4 ou 5 ans après leur acquisition.

Les différents biens immobiliers avaient par ailleurs été mis en location, à l’exception de la maison d’habitation.

L’administration fiscale, avisée de ces cessions et mises en location, avait estimé que l’ensemble des revenus des biens immobiliers (loyers et plus-values) constituaient des bénéfices d’une activité professionnelle et devaient être imposés comme tels, en raison du nombre important des acquisitions immobilières, du recours systématique à l’emprunt et de la revente de certains immeubles avec plus-value.

Devant la Cour d’appel de Bruxelles, les époux soutenaient que les revenus immobiliers perçus relevaient de la gestion normale de leur patrimoine privé, et ne pouvaient en aucun cas être qualifiés ni de revenus professionnels, ni de revenus divers.

Les époux faisaient en outre valoir que, petits indépendants, ils s’étaient constitués un patrimoine immobilier privé « sûr », afin de s’assurer des revenus de pension.

Relevant toutefois que les époux avaient acquis, au moyen d’emprunts, sept immeubles sur une période de quatre ans, pour en revendre une grande partie dans un délai bref, et mettre en location le surplus, la Cour d’appel de Bruxelles, par son arrêt du 7 novembre 2008, a considéré que la constitution du patrimoine immobilier des époux ne résultait pas d’une épargne personnelle, ni encore d’une acquisition par succession ou donation, mais procédait, au contraire, d’une prise de risque, les loyers tirés des immeubles étant destinés à financer le remboursement des emprunts.

Suivant l’argumentation soulevée par l’administration fiscale, la Cour d’appel a considéré que le nombre important de locataires avait dû nécessiter des actes de gérance suivis, tels que la mise en location, la conclusion de baux, la gestion des travaux d’entretien et de réparation, le recouvrement des loyers, la gestion des litiges locatifs, … pour l’accomplissement desquels les époux, à tout le moins l’un d’eux, avaient accordé le temps nécessaire. La Cour a également relevé le fait que l’activité de marchands ambulants avait généré peu de bénéfices au cours des périodes imposables en cause, par rapport aux revenus du patrimoine immobilier des époux, de sorte que ces derniers avaient tiré la plus grande partie de leurs revenus de ce patrimoine.

La Cour a enfin souligné que l’un des époux était administrateur d’une société dont l’objet social était notamment l’acquisition, la vente, la rénovation et la location d’immeubles, de sorte qu’il disposait des compétences requises dans le secteur immobilier.

En conséquence, la Cour d’appel de Bruxelles a validé la qualification professionnelle des revenus de l’activité immobilière des époux.

Cet arrêt de la Cour d’appel de Bruxelles rappelle la difficile démarcation entre la gestion normale d’un patrimoine privé, les revenus divers et les revenus professionnels.

Ce n’est que lorsque l’opération excède les limites de la gestion normale d’un patrimoine privé, ce que doit prouver l’administration, que le revenu de l’activité peut être qualifiable en revenu divers, et imposé à ce titre (au taux distinct de 33%).

C’est généralement dans le cadre des opérations relatives aux biens immobiliers que la distinction entre gestion normale d’un patrimoine privé et opération spéculative occasionnelle semble poser le plus de difficulté.

Il est plus rare que, comme en l’espèce, l’administration fiscale considère que les revenus issus d’opérations immobilières mises en œuvre par des contribuables sont qualifiables en revenus professionnels et imposables à ce titre.

Encore faut-il toutefois que l’on soit en présence d’une réelle occupation lucrative, soit d’un ensemble d’opérations suffisamment fréquentes et liées entre elles pour constituer une occupation continue et habituelle qui présente un caractère professionnel…

Or, dans l’espèce soumise à la Cour d’appel de Bruxelles, si l’on peut comprendre, à défaut d’admettre, que la Cour ait validé une imposition des revenus immobiliers perçus au titre de revenus divers, mettant en évidence l’existence d’une spéculation, il est douteux de considérer que les loyers et plus-values obtenus par les deux époux puissent être qualifiés de revenus d’une occupation lucrative… En effet, l’administration fiscale ne peut se baser sur le fait que l’activité réelle d’un contribuable a généré moins de bénéfices au cours de la période litigieuse que les revenus du patrimoine immobilier pour considérer qu’en réalité l’activité professionnelle de ce contribuable est constituée par les opérations immobilières mises en œuvre.

Thème : L'immobilier

Auteur : Melanie Daube

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