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Un étrange notion d'"habitant du royaume"

Un récent jugement du tribunal correctionnel de Bruxelles suscite certaines inquiétudes.

Ce jugement concerne une personne habitant Monaco, et qui possédait des actions de sociétés, elles-mêmes propriétaires au titre de seuls actifs de biens immeubles situés en Belgique.

Pour condamner le prévenu du chef de fraude fiscale, en raison de la non déclaration de revenus, le tribunal correctionnel retient comme élément justifiant que le siège de la fortune de l'intéressé se trouvait en Belgique, le fait qu'indirectement il possèderait des biens se trouvant dans ce pays.
Il se rattache ainsi à la notion de " siège de la fortune " qui, en matière d'impôts sur les revenus, justifie qu'une personne même non-résidente, puisse être taxable en Belgique.

Il semble toutefois que la conception du juge correctionnel de la notion fiscale de " siège de la fortune " soit en l'occurrence gravement erronée. Tout d'abord, suivant la jurisprudence constante, ce n'est pas l'endroit de situation de la fortune qui définit le siège de la fortune, mais bien celui d'où elle est gérée. Quand bien même le contribuable aurait possédé des biens immeubles se trouvant en Belgique, cela n'aurait nullement impliqué qu'il fût un habitant du Royaume, dès lors que la gestion de ces immeubles se serait réalisée depuis Monaco.

Mais bien plus, on voit difficilement comment l'on peut soutenir que fait partie de la " fortune " du contribuable, un immeuble qui ne lui appartient pas, puisqu'il appartient à une société étrangère. En retenant, parmi la fortune du contribuable, des biens qui ne lui appartiennent pas, le juge pénal paraît avoir fait une application, évidemment erronée, de la théorie de la réalité économique, dont on sait qu'elle est systématiquement écartée par la jurisprudence fiscale.

Une fois de plus, un juge pénal a ignoré les notions de droit fiscal, sans doute en partant de l'idée qu'il existe une " autonomie du droit pénal ". C'est là une nouvelle erreur : cette autonomie ne concerne évidemment pas les infractions au droit pénal fiscal, qui a uniquement un rôle de sanction par rapport aux infractions définies par la loi fiscale, laquelle doit évidemment primer, en ce compris dans la mesure où elle écarte la théorie de la réalité économique.

Auteur : Muriel Igalson

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