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Evaluation d'actions

Dans IDEFISC du mois de mars 2003, Colette PLASMAN commentait un jugement rendu par le Tribunal de première instance d'Anvers le 25-10-2003 en matière d'évaluation d'actions. Ce jugement vient d'être réformé par la Cour d'appel d'Anvers dans son arrêt du 23-03-2004.

Les faits étaient les suivants. Des personnes physiques, actionnaires, cèdent les actions qu'elles détiennent dans une société d'exploitation à un holding qu'elles contrôlent pour un prix X.

L'administration estime la transaction à une valeur inférieure à la valeur conventionnelle librement négociée entre parties en se fondant sur une méthode d'évaluation basée sur une moyenne pondérée de la valeur intrinsèque, de la valeur de rendement et de la méthode de cash flow. Elle taxe la différence positive dans le chef du holding en tant que " avantage anormal ou bénévole " accordé aux actionnaires, personnes physiques.

Autre élément de fait selon nous important dans l'espèce - et ayant du reste certainement influencé de manière non négligeable la décision de la Cour d'appel d'Anvers - la valeur telle qu'elle avait été évaluée par l'administration correspondait pratiquement au prix de revente par le holding, quelques mois plus tard, des actions.

Cet élément, selon la Cour, combiné avec d'autres, justifierait le maintien de la taxation au titre d'avantage anormal dans le chef du holding.

Cet arrêt nous semble fort critiquable sur différents points.

Le premier consiste en l'amalgame ou la corrélation que semble établir la Cour - et toujours l'administration - entre deux notions. D'une part, l'appréciation qualitative et quantitative d'un prétendu avantage anormal ou bénévole et d'autre part la valeur de marché.

Un avantage constitue tout enrichissement sans contrepartie équivalente (adéquate et effective) dans le chef de la personne qui octroie l'avantage. Sur ce point, l'équivalence des prestations (avantages anormaux ou bénévoles) est, par définition, relative puisqu'elle est liée à l'appréciation subjective des parties. Ce qui est inégal aux yeux de l'une des parties peut être jugé équivalent aux yeux de l'autre partie, et ce notamment en raison des circonstances de fait.

Or, nous ne pouvons raisonnablement approuver un arrêt qui - après avoir rappelé à juste titre que la valeur de marché des actions est égale en principe au prix qu'un tiers non lié aurait payé pour les actions au même moment et dans les mêmes circonstances, ajoute d'une part (à tort), que seuls des éléments objectifs pourraient être utilisés pour évaluer les actions. Et taxe d'autre part, une différence (entre la valeur conventionnelle et la valeur de marché telle qu'estimée par l'administration) déterminée uniquement au départ et en raison d'une valeur prétendue exclusivement objective au titre - justement - d'un avantage anormal qui aurait été accordé alors que cette dernière notion est intrinsèquement relative puisque soumise à l'appréciation subjective des parties.

Il ne peut exister - intrinsèquement - de corrélation entre la notion - objective exclusivement selon la Cour - de valeur de marché, et celle par définition - relative puisque liée à l'appréciation subjective des parties - d'avantage anormal ou bénévole.

La quotité de l'avantage peut dès lors - au moins - toujours être contestée.

Il est en effet évident que des actions - ou de manière plus générale un bien - peut - et a d'ailleurs souvent - une valeur conventionnelle différente de sa valeur de marché sans qu'aucun avantage anormal ou bénévole ne soit accordé, ni par le cédant, ni par le cessionnaire.

Pour s'en convaincre, il suffit de penser à l'exemple suivant. Une participation importante est détenue par une personne physique belge dans une société belge. La participation peut être estimée à une valeur de marché de 1.000.000 €. La personne physique belge trouve un acquéreur mais il s'agit d'une société non-résidente. Dans une telle hypothèse, il arrivera souvent, que l'actionnaire personne physique, préfère céder à un holding belge nouvellement créé ses actions - à tout le moins pendant un an - au lieu de céder directement la participation importante au cessionnaire société étrangère, pour éviter une taxation de la plus-value à 16,5%.

Dans ce cas, Il est clair que souvent la valeur conventionnelle des actions - ou le prix payé - par l'acquéreur sera inférieur à la valeur de marché des actions étant donné que l'acquéreur prendra en considération dans les négociations les coûts liés aux frais post-acquisition nécessités dans son chef pour éviter une taxation dans le chef du vendeur.

Il n'existe dès lors aucune correspondance nécessaire entre le " juste prix " d'une transaction et la valeur de marché d'un bien ou d'actions. Pas plus qu'il n'existe de corrélation entre la notion d'avantage et celle de valeur de marché.

Du reste, il est contraire à la notion de présomption de fonder un raisonnement à partir du fait que les parties seraient liées. Au contraire, une interdépendance entre parties ne peut leur préjudicier

Auteur : Natacha Auvertin

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