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Suppression inopinée du droit réduit de cession à titre gratuit de la clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie en Région wallonne

Jusqu’il y a peu, la Région wallonne permettait, par une disposition expresse du Code des droits d’enregistrement (art. 131bis CDE) d’enregistrer à un taux réduit (compris entre 3,3 et 7,7 %) une donation du bénéfice de la prestation d’un contrat d’assurance-vie, par la désignation du donataire en tant que bénéficiaire de ce contrat en cas de prédécès de l’assuré. Dans ce cas, le capital stipulé dans le contrat comme devant être versé au bénéficiaire en cas de prédécès de l’assuré, tel qu’existant au jour de la donation, était réputé constituer le bien meuble donné, et était utilisé pour déterminer la base taxable aux droits de donation.

Le nouveau décret, daté du 11 avril 2004 (M.b. 9 mai 2014) qui a supprimé cette possibilité, était en principe destiné à répondre à une critique formulée par la Commission européenne à l’encontre de la réglementation fiscale wallonne qui restreignait considérablement les possibilités de donation à des taux réduits de certains instruments financiers déterminés.

Si ces restrictions ont, certes, disparu suite à la modification décrétale, une disposition souvent utilisée par les contribuables wallons a disparu avec elles, de manière assez inexplicable.

Désormais, pourront être assujetties aux droits réduits de donation, les donations entre vifs de biens meubles (quels qu’ils soient), à l’exception des « donations qui sont affectées d’une condition suspensive devant se réaliser par suite du décès du donateur », c’est-à-dire dont les effets sont suspendus jusqu’au décès du donateur.

Dès lors, ces donations-là, si elles sont enregistrées, ne peuvent en bonne logique plus bénéficier du taux réduit, à défaut désormais de disposition d’exception expresse en ce sens, et doivent dès lors être soumises aux droits de donation au taux ordinaire (qui sont équivalents aux droits de succession… et qui peuvent aller jusqu’à 80% entre étrangers).

Pourtant, en 2010, le législateur décrétal wallon avait explicitement introduit dans la législation décrétale un mécanisme permettant de donner le bénéfice d’un contrat d’assurance-vie, en ne payant qu’un droit de donation réduit.

Le payement de ce droit de donation permettait d’éviter l’imposition du capital assuré aux droits de succession lors du décès, aux taux progressifs pouvant aller jusqu’à 80% selon le degré de parenté avec le défunt. Cette possibilité était intéressante aussi bien pour la Région (qui engrangeait des recette immédiates et certaines), que pour les contribuables (qui ne couraient pas le risque lié à l’éventualité d’un décès dans les trois ans du donateur).

Ce type de donation a été encouragé et d’ailleurs abondamment pratiqué en Wallonie à partir de 2010 : il offrait au contribuable une solution efficace et sûre lui permettant de transmettre son patrimoine à la génération suivante, voire même à un tiers, sans risque fiscal en cas de décès inopiné.

Les travaux préparatoires du décret sont muets quant aux raisons qui ont pu animer le législateur décrétal pour supprimer cette possibilité.

Bien entendu, il reste toujours possible de procéder à cette donation par acte sous seing privé, ce qui reste parfaitement légal et admis même par l’administration fiscale elle-même (qui a expressément mentionné dans sa circulaire explicative relative à la disposition anti-abus n°8/2012 que la donation non enregistrée restait parfaitement valable), mais le donateur et le donataire doivent alors accepter de courir le risque que les droits cédés soient quand-même taxés aux droits de succession en même temps que les autres actifs successoraux, si le donateur vient à décéder dans les 3 ans de la donation.

Il s’agit donc d’une régression particulièrement incompréhensible et peu à propos de la législation décrétale wallonne.

Auteur : Severine Segier

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