ours-idefisc

Idefisc — Actualités fiscales

Modification du régime des plus-values sur actions

IDEFISC s'est déjà fait l'écho, par le passé, de l'évolution du régime des plus-values sur actions réalisées par des personnes physiques.

Rappelons que de telles plus-values n'étaient pratiquement jamais taxées jusqu'à ce que l'administration, confrontée à la problématique des cessions de sociétés de liquidités, tente de récupérer sur les vendeurs de ces sociétés l'impôt dû mais, pour différents motifs le plus souvent frauduleux, non acquitté par celles-ci.

Pour ce faire, l'administration a pris comme base légale l'article 90, 1°, du CIR, qui range parmi les revenus divers les bénéfices ou profits qui résultent d'opérations ou de spéculations réalisées en dehors de l'exercice d'une activité professionnelle, "à l'exclusion des opérations de gestion normale d'un patrimoine privé consistant en biens immobiliers, valeurs de portefeuille et objets mobiliers". L'administration a soutenu, parfois avec succès, que les opérations susvisées sortaient du cadre de la gestion normale du patrimoine privé, ce qui justifiait l'imposition de la plus-value réalisée.

Très rapidement, l'administration a étendu cette pratique à de très nombreuses opérations dans lesquelles, en dehors de toute fraude, un contribuable vend des actions dont il est propriétaire à une société qu'il contrôle par ailleurs. C'est ce qu'on a appelé la taxation des "plus-values internes" : l'administration taxait au taux distinct de 33 % la différence entre la valeur de souscription ou d'acquisition des titres et leur valeur de revente à la holding de contrôle.

Dans un brillant article paru en 2004, le Professeur Baltus s'est insurgé contre cette pratique, en faisant valoir qu'en l'absence de texte prévoyant l'imposition des plus-values comme telles, dans le cas d'une personne physique agissant en dehors du cadre de son patrimoine professionnel, seule se justifiait l'imposition du "bénéfice ou profit" résultant des actes excédant la gestion normale du patrimoine privé, mais non la plus-value réalisée en elle-même.

Cette théorie constitue une application du principe de la "franchise générale des personnes et des choses" : tout ce qui ne fait pas l'objet d'une disposition légale prévoyant expressément une imposition, n'est pas soumis à l'impôt, par application du principe constitutionnel de la légalité de l'impôt.

Dans son arrêt du 30 novembre 2006, la Cour de cassation fait droit à cette argumentation dans les termes suivants :

"L'article 90, 1°, du CIR ne soumet pas à l'impôt la plus-value réalisée à l'occasion d'une vente excédant les limites de la gestion du patrimoine privé, mais uniquement le bénéfice ou profit qui résulte d'une telle opération".

Cette jurisprudence a très sensiblement réduit le risque de taxation des opérations de cession de titres, même à une société contrôlée par le cédant : il suffisait en effet de veiller à ce que le prix de vente des actions ou parts corresponde à la valeur de marché de celles-ci pour éviter toute imposition.

Comme il fallait s'y attendre, l'administration n'en est toutefois pas restée là.

Profitant de l'obligation faite à la Belgique de modifier sa législation relative aux fusions transfrontalières pour la mettre en concordance avec les directives européennes en la matière, le Ministre des Finances a soumis au Parlement un projet de loi qui, après plusieurs amendements et retards, a été voté fin 2008.

La loi du 11 décembre 2008, publiée au Moniteur du 12 janvier 2009, vise à imposer non plus "le bénéfice ou profit" résultant des actes qui excèdent la gestion normale du patrimoine privé, mais bien les "plus-values sur actions" résultant de tels actes, ce qui a pour effet de ruiner de tout son intérêt la jurisprudence susvisée de la Cour de cassation.

Le nouveau régime, qui est applicable depuis le jour de la parution de la loi, s'articule autour des deux éléments suivants :

  • la distinction, assez subjective, entre les actes qui excèdent la gestion normale du patrimoine privé et ceux qui sont conformes à celle-ci est maintenue, seuls les premiers pouvant entraîner une imposition ;
  • lorsque l'opération est taxable, parce qu'elle excède la gestion normale du patrimoine privé, c'est la totalité de la plus-value qui est imposable, au taux de 33 %. C'est ce que prévoit le nouvel article 90, 9°, du CIR.

Des opérations devenues aussi fréquentes que les cessions à un holding de contrôle devront donc, à présent, faire l'objet d'une analyse renforcée quant aux risques fiscaux qu'elles comportent, et quant aux moyens de minimiser ces risques. Il en va d'autant plus ainsi que selon le Service des décisions anticipées de l'administration fiscale, une cession d'actions à une société contrôlée par le cédant est nécessairement une opération qui excède la gestion normale du patrimoine privé.

Thème : Les plus-values

Auteur : Martin Van Beirs

ours-idefisc
Idefisc — Actualités Fiscales
©2003-2020 Idefisc & Words and Wires W3validator