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Notion de rétroactivité fiscale : La Cour de cassation change d’avis

En matière d’impôts sur les revenus, le caractère annuel de ces impôts a pour conséquence que la dette d’impôt ne naît, dans son principe, que le lendemain du jour de la clôture de la période imposable.

L’article 360, alinéa 1er, du Code des impôts sur les revenus dispose, en effet : « L'impôt dû pour un exercice d'imposition est établi sur les revenus que le contribuable a recueillis pendant la période imposable ».

Selon la Cour constitutionnelle, il en résulte qu’une loi fiscale ne peut être regardée comme rétroactive que lorsque, après la clôture de cette période imposable, elle modifie le régime des revenus de cette période.

Dans son arrêt du 23 juin 2004, la Cour énonce ainsi : « une règle de droit fiscal ne peut être qualifiée de rétroactive que si elle s’applique à des faits, actes et situations qui étaient définitifs au moment où elle est entrée en vigueur ; (…) En matière d’impôts sur les revenus, la dette d’impôt naît définitivement à la date de clôture de la période au cours de laquelle les revenus qui constituent la base d’imposition ont été acquis. Il résulte de l’article 360 du C.I.R. 1992 que, du point de vue de la loi fiscale, il n’existe pas de situation fixée de manière irrévocable avant la clôture de la période imposable ; (…) la dette fiscale à l’impôt global sur les revenus naît le dernier jour de la période imposable, à 24 heures. Une loi qui instaure, avant cette échéance, des faits ou des assiettes imposables nouveaux n’a pas d’effet rétroactif ».

En d’autres mots, au 31 décembre 2009, par exemple, le régime fiscal des revenus de cette année 2009 doit être définitivement régi par des dispositions légales entrées en vigueur à cette date. Toute modification ultérieure du régime fiscal de ces revenus violerait le principe de non-rétroactivité.

Par son arrêt du 14 mars 2008, la Cour de cassation s’est ralliée à la définition que la Cour constitutionnelle donne à la notion de rétroactivité, en matière d’impôts sur les revenus annuels.

Cet arrêt a été rendu à propos d’un règlement communal, voté en février 2001, qui établissait les additionnels communaux à l’impôt des personnes physiques, afférents à la période imposable 2000.

La Cour de cassation énonce qu’« en matière d’impôts sur les revenus, la dette d’impôt naît définitivement à la date de clôture de la période au cours de laquelle les revenus qui constituent la base imposable ont été acquis ».

La Cour décide dès lors que l’arrêt attaqué, rendu par la Cour d’appel de Mons, justifie légalement sa décision, en annulant les additionnels à l’impôt des personnes physiques enrôlés sur la base du règlement-taxe litigieux, pour le motif que « (ce) règlement-taxe a nécessairement un effet rétroactif dès l’instant où, voté deux mois après la fin de la période imposable en vue de déterminer l’assiette de la taxe, il a ‘pour objet de conférer des effets de droit à une situation de fait qui lui est antérieure en date’ ».

La haute juridiction considérait auparavant – et depuis longtemps – que « du point de vue de la loi fiscale, il n’existe pas de situation irrévocablement fixée avant la clôture de l’exercice d’imposition ».

Dans cette conception, largement critiquée, une loi publiée en décembre 2009, applicable à partir de l’exercice d’imposition 2009, n’aurait pu être qualifiée de rétroactive, en dépit de la circonstance que, pour l’essentiel des contribuables, la période imposable correspondante aurait été clôturée depuis le 31 décembre 2008.

Cette conception de la rétroactivité des lois fiscales était donc moins favorable aux contribuables.

L’on peut se réjouir du fait que la Cour de cassation se soit en définitive rendue à la définition que la Cour constitutionnelle donne à la notion de rétroactivité en matière d’impôts sur les revenus annuels.

Dans la situation ancienne, la jurisprudence divergente des deux cours conduisait le contribuable qui souhaitait invoquer la conception la plus favorable de la rétroactivité à devoir saisir la Cour constitutionnelle.

Il reste que l’on peut se demander si, pour apprécier l’existence d’une norme rétroactive ou non et le respect du principe de sécurité juridique, le critère du moment où naît la dette d’impôt est pertinent.

Auteur : Olivier NEIRYNCK

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