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Litiges QFIE: le fisc a perdu

Au début des années 1990, l’ISI a lancé une spectaculaire opération visant les nombreuses sociétés qui avaient recouru à des acquisitions massives de titres étrangers dans le but de déduire une quotité forfaitaire d’impôt étranger.

La plupart des sociétés avaient acquis des bons du Trésor italien, en quantité massive, juste avant l’échéance du coupon de ceux-ci, et les avaient revendus après.Le système permettait à l’époque – la loi a changé depuis – d’imputer une quotité égale à 15 % du revenu perçu à l’étranger, sur l’impôt belge, et ce même si le montant effectivement payé à l’étranger, soit en l’espèce en Italie, était inférieur à ce taux. Comme le taux italien était effectivement nettement inférieur aux 15 % d’impôt imputable en Belgique, l’opération, réalisée dans un but exclusivement fiscal, aboutissait à une réduction, voire à une disparition de l’impôt des sociétés.

De tels actes sont licites s’ils ne sont pas simulés.

L’administration a affecté une cellule de fonctionnaires à l’examen.La plupart des sociétés ont introduit des réclamations, que l’administration n’a pas tranchées,sans doute parce qu’elle sentait son dossier faible.Des plaintes ont été déposées au pénal et ont abouti à un certain nombre de perquisitions, mais rien n’a encore été jugé sur le plan répressif.

Une affaire a été tranchée sur le plan fiscal par le tribunal de première instance de Bruxelles, le 26 juin dernier.

D’après le jugement rendu, l’administration invoquait, comme elle le fait dans quasiment tous les dossiers que des documents faux auraient été produits, mais sans l’établir, malgré l’accès au dossier répressif dont elle a disposé.Il paraît d’ailleurs difficilement imaginable que toutes les banques de Belgique ettoutes les sociétés concernées, soit paraît-il un millier, aient toutes utilisé des documents faux, comme paraît le croire l’administration dans sa thèse du “grand complot” ourdi contre elle.

Le tribunal décide par ailleurs par un attendu de principe particulièrement important, qu’il est sans intérêt que l’opération, consistant à emprunter pour acquérir des titres étrangers, devait nécessairement générer une perte avant impôt, et n’était bénéficiaire qu’en raison de l’avantage fiscal que l’opération procurait.

En disant que la quotité forfaitaire d’impôt étranger, certes déductible des revenus, constituait d’abord un revenu imposable, le tribunal a décidé que le but poursuivi par la société requérante était bien d’acquérir des revenus mobiliers, taxables à l’impôt de sociétés comme revenus professionnels, de sorte que les frais engagés à cet effet réunissent les conditions pour être déductibles à titre de frais professionnels.

Le tribunal a également écarté les arguments de l’administration qui voyait en une telle opération, une opération simulée, parce qu’elle avait un but fiscal. Il s’agit là d’une application normale et habituelle du principe du choix licite de la voie la moins imposée.Le tribunal de première instance de Mons a également donné raison au contribuable dans un jugement du 20 juin très motivé.

Même si certaines opérations réalisées sur des titres autres qu’italiens, sont sans doute différentes de celles tranchées par le tribunal de première Instance, il faut se rendre compte que l’immense majorité des contribuables qui ont recouru à ce procédé l’ont fait dans des circonstances extrêmement proches de celles jugées par le tribunal. On peut se demander s’il était bien justifié, pour l’administration, aidée par une certaine presse, de créer un immense scandale, avec de multiples allégations de fraude, à propos d’une opération qui se révèle, en tout cas, d’après le jugement rendu, comme parfaitement licite.

Cette matière n’est pas la première dans laquelle on constate que l’administration ameute les milieux politiques et les médias pour tenter de créer une impression de fraude à propos de contribuables déterminés et où ensuite ses positions s’effondrent devant les tribunaux.

Dans le cas particulier de la QFIE, ce système s’est doublé d’une mise au frigo volontaire des quantités de réclamations tant que la loi le permettait, et du recours à toutes les méthodes de procédure possibles pour retarder les jugements des tribunaux.

Il est piquant de voir une administration de l’Etat aggraver l’arriéré judiciaire alors qu’un des objectifs annoncés à grand fracas de toutes les déclarations gouvernementales, depuis des décennies est de lutter contre celui-ci.

Auteur : Sophie Vanhaelst

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