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Le droit au silence en matière fiscale

La Cour d’Appel de Liège vient de rendre une nouvelle décision favorable aux contribuables au sujet de la possibilité d’invoquer le droit de se taire en matière fiscale.

Dans son arrêt du 31 mars 2010 (non encore publié), la Cour a confirmé sa jurisprudence en rappelant que dès que l’administration porte des indices de fraude fiscale à la connaissance d’un contribuable et annonce des accroissements d’impôt de 50% dans son chef, celui-ci peut parfaitement faire valoir son droit au silence.

La Cour d’Appel de Liège va encore plus loin en décidant que la taxation d’office, qui est établie à l’égard de ce contribuable au motif précisément qu’il n’a pas fourni les renseignements requis, est nulle et non avenue.

Selon la Cour, le droit au silence ne peut être « pénalisé d’une quelconque manière ». La Cour d’Appel de Liège semble ainsi ériger le droit au silence au rang de norme supérieure et absolue.

Le droit au silence est en effet issu des Conventions internationales conclues par la Belgique, notamment des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme ainsi que de l’article 14 du Pacte international sur les droits civils et politiques, qui garantissent le droit à un procès équitable.

Ce droit ne peut être invoqué par le contribuable qu’à partir du moment où « où une procédure aboutit ou peut aboutir à une sanction procédant d’une accusation en matière pénale au sens de cette disposition » (Voy. notamment : Cass, 31 mai 2002, J.L.M.B., 2003/21, p.927).

La question délicate est donc celle de connaître le point de départ permettant au contribuable d’user de son droit au silence et, en d’autres termes de savoir à partir de quand il y a lieu de considérer que le contribuable tombe sous le coup d’une accusation en matière pénale.

Selon plusieurs décisions, dont l’arrêt rendu le 31 mars dernier par la Cour d’Appel de Liège, ce droit de se taire peut être exercé dès le moment où le contribuable a connaissance de sanctions fiscales administratives à caractère pénal qui pourraient lui être infligées, comme par exemple des accroissements d’impôt.

Une partie de la doctrine soutient que le contribuable peut user de son droit au silence dès qu’il a été notifié par l’administration d’indices de fraude fiscale. Autrement dit, ce droit au silence peut être invoqué dès le moment où il existe un simple soupçon de fraude à charge du contribuable lui faisant craindre d’éventuelles poursuites pénales ultérieures.

Il existe néanmoins une jurisprudence contraire, soutenue par une partie de la doctrine et considérant que le droit au silence ne pourrait être invoqué qu’au stade de la procédure pénale en tant que telle, notamment lorsque l’administration a l’intention de déposer une plainte pénale et, non au stade du simple contrôle fiscal qui ne relève que de la phase administrative de l’enquête.

Une telle interprétation paraît cependant ignorer que les sanctions prévues par les Codes fiscaux ont-elles-mêmes un caractère pénal, en raison de leur caractère dissuasif. Tant le Conseil d’Etat que la Cour de cassation et la Cour constitutionnelle en ont décidé ainsi.

Auteur : Ronny Favel, Ellen Cassaer

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