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La mention d’un délai de réclamation erroné sur les avertissements-extraits de rôle risque d’entraîner la nullité de bon nombre de taxations

Par l’article 7 de la loi du 20 juillet 2006, le délai de réclamation contre une imposition en matière d’impôts sur les revenus a été prolongé de trois à six mois, et ce à partir du 1er août 2006.

Or, dans bon nombre d’avertissements-extraits de rôle, il a été mentionné erronément que le délai de réclamation était de trois mois.

Cette “désinformation” est de nature de créer une grande insécurité juridique auprès des contribuables concernés.

L’article 371 du Code des Impôts sur les Revenus, disposition d’ordre public, stipule cependant que “les réclamations doivent être motivées et introduites, sous peine de déchéance, dans un délai de six mois à partir de la date d’envoi de l’avertissement extrait de rôle mentionnant le délai de réclamation ou de l’avis de cotisation ou de celle de la perception des impôts perçus autrement que par rôle.”

En premier lieu, il est indiscutable que dans tous les cas où un délai de réclamation erroné a été mentionné, le délai n’a pas commencé à courir. En effet, pour que le délai de réclamation commence à courir il faut que l’avertissement-extrait de rôle reprenne toutes les informations nécessaires permettant au contribuable d’introduire une réclamation (Cass., 14 juin 2006, FJF 2003/16). Il y a lieu également de se référer à l’article 2 4° de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité des actes administratifs selon lequel tout document par lequel une décision ou un acte administratif à portée individuelle émanant d'une autorité administrative fédérale est notifiée à un administré, indique les voies éventuelles de recours, les instances compétentes pour en connaître ainsi que les formes et délais à respecter, faute de quoi le délai pour introduire le recours ne prend pas cours.

Les conséquences de ce vice de procédure, ne s’arrêtent toutefois pas là : comme mentionné ci-dessus, l’article 371 du Code est d’ordre public et prévoit depuis la réforme de la procédure fiscale de 1999 explicitement que le délai de réclamation doit être mentionné sur l’avertissement-extrait de rôle. Le fait que l’avertissement-extrait de rôle mentionne un délai erroné implique dès lors que la procédure de taxation est entachée de la violation d’une disposition légale, ce qui entraîne en principe la nullité de la taxation.

Il s’ajoute à cela que le contribuable a été erronément informé par l’administration sur ses possibilités de recours ce qui implique également une violation des principes de bonne administration tels que le principe de sécurité juridique et le devoir de diligence dans le cadre de la procédure de taxation.

Confrontée à une réclamation dans laquelle l’impôt n’a pas été établi conformément à une règle légale, l’administration fiscale est censée annuler la taxation en question. Elle pourra toutefois réenrôler l’impôt conformément aux dispositions de l’article 355 CIR 92. Si le contribuable a payé les impôts concernés, il aura droit au remboursement des intérêts moratoires éventuellement payés.

La situation est plus délicate pour l’administration fiscale lorsque le directeur régional ou le fonctionnaire délégué par celui-ci s’est abstenu de statuer sur la réclamation introduite par le contribuable et de prendre une décision dans un délai de 6 mois. En effet, dans ce cas, le contribuable a le droit de porter le litige devant les tribunaux et d’introduire un recours devant le tribunal de première instance afin que la taxation puisse être annulée dans la phase judiciaire.

Dans ce cas, l’épée de Damoclès qui pend au-dessus de la taxation est d’autant plus aiguisée. En effet, la loi ne prévoit pas la possibilité pour l’administration fiscale de réenrôler l’impôt dans l’hypothèse d’une annulation, dans la phase judiciaire, d’un impôt n’ayant pas été validé préalablement par une décision directoriale.

Dans tous ces cas, les impôts seront définitivement perdus … autant de recettes définitivement perdues pour la trésorerie de l’Etat.

Auteur : Philippe GODDEVRIENDT van OYENBRUGGE

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