ours-idefisc

Idefisc — Actualités fiscales

Le principe de non-rétroactivité à l'oeuvre

La Cour d'arbitrage a récemment (arrêt du 18 avril 2001) annulé une partie d'une disposition de la loi du 4 mai 1999 portant des dispositions fiscales diverses en raison de son effet rétroactif.

En vertu de l'article 219, alinéa 1er CIR 92, lorsqu'une société ne justifie pas les dépenses visées à l'article 57 du CIR (les commissions, courtages, honoraires et avantages de toute nature qu'elle paie à des bénéficiaires, pour lesquels ces sommes constituent des revenus professionnels, ou encore les rémunérations et pensions versées aux membres ou anciens membres du personnel ainsi qu'aux administrateurs ou gérants) par la production de fiches individuelles et de relevés récapitulatifs, elle est redevable d'une cotisation spéciale égale à 300 % de ces dépenses.

Cela concerne notamment les chiffres d'affaires réalisés en noir par une entreprise et dont le produit sert à payer de façon occulte des dépenses de même nature que celles visées à l'article 219.

Auparavant, la jurisprudence exigeait de l'administration la preuve que des bénéfices dissimulés aient quitté le patrimoine de la société et qu'ils aient servi à des dépenses au sens de l'article 57 CIR. L'administration devait ainsi apporter la triple preuve suivante :

  1. L'existence de bénéfices dissimulés sur la base de présomptions de fait ou légales ;
  2. Le fait que le bénéfice fixé ainsi avait quitté l'entreprise et
  3. Que ce bénéfice avait servi à des dépenses visées à l'article 57 CIR.

Cette démonstration était fréquemment interprétée - et à juste titre - par la jurisprudence comme une cascade de présomptions puis rejetée. C'est la raison de la modification législative permettant à l'administration d'établir la cotisation 300 % sans devoir démontrer que ces bénéfices ont quitté l'entreprise de la manière visée à l'article 57.

L'article 48 de loi du 4 avril 1999 déterminait l'entrée en vigueur de la modification de l'article 219 du Code des impôts sur les revenus.

L'arrêt de la Cour d'arbitrage annule l'application de cette modification à l'exercice d'imposition 1999, soit pour les sociétés qui clôturent leur exercice comptable au 31 décembre, depuis le 1er janvier 1998.

La Cour se fonde implicitement sur le principe de sécurité juridique afin de prononcer l'annulation de l'entrée en vigueur de cette disposition. En effet, le principe de non-rétroactivité de la loi fiscale découle, dans la jurisprudence de la Cour d'arbitrage, de la combinaison du principe de sécurité juridique avec le principe constitutionnel de l'égalité.

Toute loi rétroactive, même fiscale, n'est toutefois pas annulée systématiquement. La Cour d'arbitrage admet ainsi des dérogations au principe de non-rétroactivité lorsqu'il existe une justification objective et raisonnable de l'application rétroactive d'une disposition et lorsque la mesure est proportionnée au but légitime poursuivi par le législateur.

La Cour constate, in casu, qu'aucune justification n'avait été donnée par le gouvernement à l'effet rétroactif de l'article 48 et annule ainsi la partie de l'article concernant l'effet rétroactif de la modification en question.

Tristan KRSTIC

Auteur : Tristan Krstic

ours-idefisc
Idefisc — Actualités Fiscales
©2003-2020 Idefisc & Words and Wires W3validator