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La participation des travailleurs dans le capital et les bénéfices des sociétés: le décevant nouveau cadre légal

La Chambre a adopté, une loi relative au régime de participation des travailleurs au capital et aux bénéfices des sociétés ce 22 mai 2001. Le texte légal a été publié au Moniteur du 9 juin.

Son objectif consiste à rendre plus attrayante la participation financière des travailleurs, par le biais de certains avantages, afin de stimuler leur motivation et, partant, les performances.

Dorénavant, une société ou un groupe assujetti(e) à l'impôt des sociétés, à l'exclusion des centres de coordination, pourra mettre sur pied un plan de participation, fruit d'une concertation collective entre l'employeur et les travailleurs. Ce dernier terme vise également les personnes liées à l'employeur par un contrat d'apprentissage, de stage ou de formation professionnelle. Le plan devra impérativement être proposé à l'ensemble des travailleurs de l'entreprise. Néanmoins, le plan de participation pourra prévoir une condition d'ancienneté minimale ne dépassant pas un an.

Si le plan doit être proposé à tous les travailleurs, qu'ils soient stagiaires depuis treize mois dans l'entreprise ou cadres dirigeants, la proposition ne doit pas nécessairement être faite dans les mêmes termes. Ainsi, il est dit que le plan doit obligatoirement mentionner les critères objectifs servant à déterminer le montant à attribuer à chacun des travailleurs adhérents. Ces critères doivent être définis par une convention collective de travail. A défaut de CCT, un arrêté royal délibéré en Conseil des Ministres, fixera des critères objectifs. Cette possibilité de faire des gradations dans l'octroi des avantages était, évidemment, absolument nécessaire pour que le système rencontre quelque succès. Dans la mesure où elle dépend d'une négociation collective ou d'un arrêté royal, il est cependant peu probable que la formule permette réellement de donner des avantages significatifs aux cadres et il paraît impossible de l'utiliser pour personnaliser les avantages.

Plusieurs types de participations sont envisagés: d'une part, une participation au capital, consistant pour la société à attribuer gratuitement des actions aux membres de son personnel, impliquant une augmentation de capital par incorporation de bénéfices (et une dilution de l'actionnariat), d'autre part, une participation aux bénéfices, enfin, une participation alliant les deux types, suivant des proportions déterminées dans le plan.

Ne peuvent donc mettre en place un plan de participation au capital que les sociétés qui réalisent un bénéfice.

Des limites sont imposées à ces participations: le montant total de participation au capital et aux bénéfices ne peut excéder, soit 10 % de la masse salariale brute, soit 20 % du bénéfice de l'exercice après impôt (à calculer sur une base consolidée pour les groupes). Il doit par ailleurs être prévu dans ledit plan une formule révélant le lien avec les résultats.

Le texte prévoit la possibilité de constitution d'une société distincte, dont la mission sera de détenir et de gérer les actions attribuées, appelée société coopérative de participation. Selon l'exposé des motifs, le recours à celle-ci ne sera, pour les travailleurs, pas plus onéreux que la perception directe de l'avantage sous réserve de certains frais de gestion. La société coopérative ne sera, à cet effet, imposée que sur certaines dépenses non admises et sur ses dépenses non justifiées. L'inutilité d'une telle société a été relevée par le Conseil d'Etat.

Sur le plan fiscal, les travailleurs ne seront pas astreints au régime fiscal applicable aux rémunérations. D'ailleurs, la participation ne se substitue en aucun cas à la rémunération, mais doit s'ajouter à elle.

Sommairement, cet "avantage de type nouveau" sera imposé selon les principes évoqués ci-après.

L'avantage subira une retenue à la source. Ainsi l'employeur, responsable vis-à-vis du fisc, effectuera un prélèvement libératoire et forfaitaire. La retenue à la source sera plus faible dans les hypothèses de participation au capital (15%) que dans celles de participation aux bénéfices ( 25 %). Néanmoins, le taux réduit de taxation sera majoré à défaut de détention des titres durant la période fixée par le plan. En ce qui concerne les PME, le taux réduit sera également d'application en cas d'attribution d'une participation aux bénéfices en espèces, à la condition que les travailleurs affectent immédiatement les sommes à des prêts consentis en faveur de l'employeur, ce dernier devant les destiner à la constitution d'immobilisations.

Une condition d'indisponibilité des titres est imposée par le texte, d'une durée variant entre 2 et 5 ans, selon les prévisions de la convention collective de travail. En cas de non respect de cette condition, une taxe additionnelle à la taxe assimilée à l'impôt sur les revenus dont question ci-avant, sera due sur l'avantage. Son taux sera de 23,29 %.

Le mode de perception de la taxe, prélèvement à la source forfaitaire et libératoire, dispensera les travailleurs d'indiquer l'avantage dans leur déclaration à l'impôt des personnes physiques. Il aura encore pour conséquence qu'une fois les effets ou espèces attribués, les revenus ou plus-values qu'ils pourraient dégager subiront le régime fiscal qui leur est propre et non celui applicable aux rémunérations. Dans le chef de la société employeur, les participations bénéficiaires ne seront pas déductibles au titre de frais professionnels. Aussi, les déductions prévues aux articles 199 à 206 du Code des impôts sur les revenus (p. ex.: les RDT) seront pratiquées sur une base imposable dont seront retranchées ces participations.

Sur le plan de la procédure, les modes d'établissement, de recouvrement et de versement de la taxe et de la taxe additionnelle suivent les règles applicables à l'établissement, au recouvrement et au versement du précompte immobilier.

Le texte modifie encore le Code des droits d'enregistrement. En effet, il exempte du droit proportionnel de 0,5% les augmentations de capital statutaires effectuées en application d'un plan de participation, à concurrence du montant du bénéfice de l'exercice comptable attribué aux travailleurs. Il exonère également les apports à une société coopérative de participation effectués conformément à ses dispositions.

Enfin, sur le plan social, l'employeur sera dispensé du versement de toute cotisation patronale relativement à ces participations. De leur côté, les travailleurs devront verser une « cotisation de solidarité » de 13,07 % du montant liquidé. Précisons qu'en ne qualifiant pas de rémunération les avantages, le législateur les soustrait à la loi du 12 avril 1965 concernant la protection de la rémunération des travailleurs et donc, par exemple, à ses dispositions concernant les saisies de rémunérations. Le législateur prive par là les travailleurs de certains droits. Budgétairement, la taxe sera en partie rétrocédée aux organismes de sécurité sociale.

En fin de compte, alors que l'exposé des motifs de la loi parle d' « avantages importants », le régime applicable aux participations aux bénéfices ne se différencie en rien, sur le plan fiscal, du régime applicable aux dividendes. Si on y rajoute les conditions d'action à prévoir par arrêté royal ou à négocier avec les syndicats, il semble que le nouveau régime sombrera très vite dans l'oubli. Les avantages attribués dans ce cadre étant une dépense non admise, ils subissent l'impôt des sociétés au taux de 40,17%. Ils subissent ensuite une retenue à la source de 25% (régime général). Le taux n'est en fin de compte pas plus avantageux que le taux marginal le plus élevé à l'impôt des personnes physiques. Seul l'aspect des cotisations de sécurité sociale demeure dès lors intéressant.

Dorothée DANTHINE

Auteur : Dorothée Danthine

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