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Sociétés de liquidités – un nouvel arrêt important de la Cour d’appel d’Anvers

Les affaires de sociétés de liquidités sont de plus en plus nombreuses à aboutir au stade du jugement devant les tribunaux.

La Cour d’appel d’Anvers, dans un tout récent arrêt du 10 février 2010, vient de rendre une décision importante, et d’autant plus significative qu’elle a été prononcée en matière pénale.

L’on sait que dans de nombreuses affaires, jugées par les tribunaux fiscaux, la position du fisc, consistant à imposer les vendeurs de sociétés dites de liquidités, sur les plus-values réalisées par eux, est rejetée, pour le motif que les opérations relèvent de la gestion normale du patrimoine privé, ou en tout cas qu’elles ne recèlent pas de bénéfice ou de profit anormal imposable à titre de revenus divers.

Depuis quelques années, le fisc tente, par tous les moyens, y compris dilatoires, de faire trancher ce type d’affaires d’abord par les juridictions pénales, dont il escompte sans doute une attitude plus répressive.

Un jugement du tribunal correctionnel d’Anvers, du 17 janvier 2008, avait ému les milieux d’affaires de la Région, parce que le tribunal avait condamné à des peines, assez lourdes, des personnes, souvent connues, qui avaient vendu leurs participations dans des sociétés à des Suédois qui avaient déclaré vouloir procéder à des investissements à titre de remploi des plus-values réalisées avant la cession, et qui n’en avaient rien fait, se contentant apparemment d’empocher les sommes figurant au crédit des comptes des sociétés acquises. Si la condamnation de ceux-ci n’avait surpris personne, l’illégalité paraissant évidente en raison de l’existence d’un revenu imposable non déclaré, celle des vendeurs des actions, qui déclaraient être de bonne foi et ne pas connaître les intentions frauduleuses des acquéreurs, avait paru plus surprenante. Il en est d’autant plus ainsi que, comme exposé ci-dessus, les plus-values réalisées par eux sont presque toujours considérées comme non taxables par les juridictions fiscales.

La Cour d’appel d’Anvers vient de réformer le jugement du tribunal correctionnel. Tout en maintenant une condamnation ferme à l’égard d’un des acquéreurs suédois, il prononce un acquittement général pour toutes les autres parties, soit les vendeurs et leurs conseillers. La Cour constate qu’il n’est pas établi que ces personnes connaissaient l’intention frauduleuse des acquéreurs, et, en outre, - et c’est sans doute le motif le plus significatif - que le fait d’obtenir un prix plus élevé, pour leurs actions, que celui qui aurait résulté de la prise en compte des impôts latents au moment de la cession, ne démontre aucune mauvaise foi de leur part. En effet, pour la Cour, il est normal d’obtenir pour les actions un prix de vente plus élevé, que la différence entre le montant des liquidités et la provision fiscale éventuellement à comptabiliser, puisque l’acquéreur aurait pu éviter légalement de payer les impôts en cause en procédant à des investissements conformément à l’article 47 du Code des Impôts sur les Revenus.

Cet arrêt vient une nouvelle fois contredire la position de la Commission parlementaire sur la fraude fiscale. Celle-ci, qui était partie du principe – reconnu inexact par la quasi-totalité de la jurisprudence – selon lequel toutes les opérations de sociétés de liquidités sont frauduleuses dans le chef de toutes les parties en cause, se voit une nouvelle fois opposer un démenti, cette fois par une Cour d’appel siégeant en matière répressive.

De plus, il est piquant de constater que cette Commission avait présenté comme un modèle à suivre la manière dont le Parquet d’Anvers avait agi dans les affaires de sociétés de liquidités, en poursuivant systématiquement toutes les parties intervenantes, y compris les vendeurs de bonne foi, les banques et les conseillers des parties. Ce Parquet est aujourd’hui fermement désavoué par sa Cour d’appel, et les conclusions du rapport de la Commission d’enquête perdent le peu de crédibilité qu’elles pouvaient encore avoir aux yeux de certains.

Auteur : Thierry Afschrift

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