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La taxation des plus-values internes à nouveau rejetée

Un arrêt de la Cour d’appel de Mons du 18 juin 2008 confirme l’absence de fondement de la position administrative taxant à titre de revenus divers les plus-values internes réalisées par des contribuables dans la gestion de leur patrimoine privé (2004/RG/78).

En l’espèce, par une convention de cession d’actions, un contribuable avait vendu à une société anonyme dont il était actionnaire majoritaire les actions d’une société d’exploitation.

Dans le cadre de cette opération, la personne physique réalisa une importante plus-value.

L’administration fiscale estimait que l’opération pouvait être taxée à titre de revenus divers, estimant que l’opération s’écartait de la gestion « normale » du patrimoine privé du contribuable.

Le contribuable avait gagné devant le tribunal de première instance de Mons et l’administration fit appel de la décision.

La Cour d’appel de Mons exclut d’emblée l’opération spéculative, constatant que l’on ne se situe pas dans le cadre d’opérations comportant de nombreux risques et pour lesquelles il existe une possibilité de réaliser un bénéfice important ou une lourde perte en raison de hausse ou de baisse de prix.

La Cour note qu’en l’occurrence, les titres proviennent d’une société familiale, que de longues années se sont écoulées entre les opérations et qu’en cas de cession d’actions à une société holding personnelle, il n’y a par hypothèse pas d’intention spéculative.

L’administration soutenait par ailleurs que l’opération dépassait la gestion normale du patrimoine privé.

Selon elle, les opérations sur actions sont imposables au titre de revenus divers lorsque les actions ont été acquises pour l’exercice d’une activité professionnelle, qu’elles sont détenues par un actionnaire influent et ne présentent pas un grand degré de liquidité.

La Cour d’appel ne suit pas le raisonnement administratif.

L’arrêt de la Cour d’appel est intéressant en ce qu’il précise que la simple création d’une société holding, suivie de la vente d’une participation à cette société peu après ne constitue pas l’indice d’une opération complexe taxable. La Cour relève également qu’il peut parfaitement être admis que le contribuable qui est administrateur de sociétés et dispose d’un patrimoine important, ait pu créer une société afin de réorganiser son patrimoine sur le plan successoral ou dans le but d’alléger sa charge fiscale, sans pour autant sortir de la gestion normale du patrimoine privé que tout bon père de famille peut accomplir pour la mise à fruit, la réalisation ou le remploi de ses avoirs.

Enfin, la Cour relève que la création d’une société holding propre et l’apport d’actions d’une société d’exploitation constituent des opérations normales dans le cadre de la gestion normale du patrimoine privé.

A titre surabondant, la Cour relève que l’importance ou la hauteur de la plus-value réalisée est dépourvue de toute pertinence pour apprécier la nature et la qualification fiscale de cette plus-value réalisée lors de la vente des actions litigieuses au regard d’une gestion normale du patrimoine privé.

Et la Cour d’en conclure que le contribuable n’a fait que choisir la voie la moins imposée en posant des actes juridiques dont il a accepté toutes les conséquences, sans violer aucune obligation légale, afin de structurer son patrimoine de façon telle que les avoirs industriels puissent être destinés à son fils né d’une première union conjugale tandis que sa fille née d’une seconde union se verrait attribuer les avantages financiers de son patrimoine.

Le lecteur se réjouira de cette confirmation de la licéité du choix de la voie la moins imposée.

Enfin, et par ailleurs, la Cour écarte l’application de l’article 344, § 1er du CIR (mesure anti-abus permettant dans certaines hypothèses la requalification), notant que l’opération a en l’occurrence été réalisée dans le cadre de la gestion du patrimoine privé et que, comme l’a reconnu le ministre des finances lui-même au cours des travaux préparatoires qui ont précédé l’adoption de l’article 344, § 1er, cette disposition ne s’applique pas dans le cadre de la gestion d’un patrimoine privé.

La Cour confirme dès lors le jugement du Tribunal de première instance de Mons du 14 octobre 2003, à l’exception de la réouverture des débats qui avait été ordonnée par le tribunal de première instance sur la question de l’article 344, § 1er.

Cette jurisprudence doit bien sûr être approuvée en tous points.

Thème : Les plus-values

Auteur : Pascale Hautfenne

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