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Taxe Caïman : la loi-programme est publiée

La loi-programme du 10 août 2015, parue au Moniteur le 18 août dernier, instaure, à partir de l'exercice d'imposition 2016, c’est-à-dire pour les revenus recueillis à compter du 1er janvier 2015, un régime de taxation spécifique pour les revenus qui sont perçus ou attribués par une construction juridique.

Structures visées

Deux types de structures sont visées, selon qu'elles sont dotées de la personnalité juridique ou non:

  • d'une part, toutes les relations juridiques créées par un acte du fondateur ou par une décision judiciaire, par lequel ou laquelle des biens ou des droits sont placés sous le contrôle d’un administrateur afin de les administrer dans l’intérêt d’un ou plusieurs bénéficiaires ou dans un but déterminé. Sont notamment visés les trusts et structures analogues, non dotées de la personnalité juridique.
  • d'autre part, les entités dotées de la personnalité juridique dont les revenus ne subissent pas une imposition d'au moins 15%.

Les formes juridiques qui sont établies dans un pays faisant partie de l’Espace économique européen ne constituent pas des constructions juridiques, à la seule exception de celles qui figureront sur une liste qui sera établie par un arrêté royal qui devra être confirmé par une loi.

S'agissant au contraire des formes juridiques qui ne sont pas établies dans un Etat faisant partie de l’Espace économique européen, un arrêté royal (qui devra être confirmé par une loi) établira, de manière non limitative, celles qui seront visées par la nouvelle mesure.

Transparence

Un mécanisme d’imposition au niveau du fondateur des revenus perçus et/ou distribués par une construction juridique est instauré par la nouvelle loi.

Les revenus de constructions juridiques étrangères précités sont imposés comme s’ils étaient détenus directement par les contribuables visés à l’article 3, CIR 92 (impôt des personnes physiques) et à l’article 220, CIR 92 (impôt des personnes morales).

Lorsque la construction juridique a été constituée par plusieurs fondateurs, chaque fondateur sera imposable en proportion de son apport dans la construction juridique ou, à défaut de pouvoir établir celle-ci, chacun pour une part identique.

La fiction de transparence fiscale vise tous les revenus perçus par la construction juridique qui seront imposés suivant la nature qu’ils auraient eue si les fondateurs les avaient recueillis directement. Il pourra s’agir de revenus immobiliers, de revenus de capitaux et biens mobiliers, de revenus professionnels ainsi que de revenus divers.

Sauf s’il est établi que les revenus précités ont été payés ou attribués à un tiers bénéficiaire. Le contribuable imposable est l’habitant du Royaume qui est un fondateur de la construction juridique. Il sera imposable sur les revenus précités comme s’il les recueillait directement.

Respect des conventions préventives et des libertés fondamentales

L’Exposé des Motifs de la loi précise que « l’impôt de transparence est bien entendu appliqué dans le respect des conventions préventives de la double imposition conclues par la Belgique et des libertés fondamentales telles que définies dans des Traités européens. » (Exposé des Motifs, p. 33).

Cette précision est certes rassurante, mais, même si elle ne figurait pas dans l'Exposé des Motifs, ce respect irait de soi, puisque les conventions préventives de la double imposition constituent du droit international directement applicable qui prime sur le droit interne belge. Il en va a fortiori de même des libertés fondamentales définies dans les Traités européens.

Il restera toutefois à voir comment ce respect sera assuré, car la loi ne prévoit rien à ce sujet.

En toute hypothèse, le juge fiscal veillera au respect de ces normes internationales.

Implications pratiques de la transparence fiscale

Les revenus mobiliers perçus par la structure seront imposables (intérêts et dividendes) au taux actuel de 25% dans le chef du fondateur ou du tiers bénéficiaire1 .

Les plus-values sur actions réalisées par la structure seront généralement exonérées dans le chef de la personne physique, conformément au principe de l’exonération des plus-values sur actions réalisées dans le cadre de la gestion du patrimoine privé (Article 90, 9°, CIR)2 .

Si la structure détient des actifs qui ne génèrent pas de revenus dans son chef, la transparence ne devrait pas avoir d’impact sur le fondateur.

Il sera donc utile, pour les structures existant encore à ce jour, d'investir dans des actifs ne générant pas de revenu imposable dans le chef d'une personne physique résidente belge (il peut en aller ainsi des cas où la structure détient des participations dans des sociétés qui ne distribuent pas de dividendes par exemple).


1Il faut noter que le gouvernement a par ailleurs décidé de porter le taux de 25 % à 27 % à partir du 1er janvier 2017. Ceci fera l’objet de l’adoption d’une loi dans les mois à venir.
2 On notera que le gouvernement a également décidé d’instaurer, dans une prochaine législation à adopter, une taxe sur la spéculation qui frappera les revenus résultant de la réalisation rapide des actions ou parts. Des précisions doivent encore être apportées quant à la manière dont la taxe sera appliquée et quant au taux qui sera appliqué. Le caractère « rapide » résulterait a priori d’une revente dans un délai de 6 mois.

Auteur : Pascale Hautfenne

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