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Qui prime? La procédure fiscale ou la procédure civile?

Il devient relativement fréquent que l'administration fiscale porte plainte au pénal lorsque des opérations qu'elle juge contestables sont réalisées de manière volontaire par des contribuables. On ne peut s'empêcher de penser que, dans certains cas, l'administration instrumentalise la justice pénale pour tenter d'obtenir des preuves qu'elle n'est pas capable d'obtenir directement. Dans d'autres cas, il n'est pas exclu que certains fonctionnaires tentent de faire juger l'affaire au pénal, parce que le contribuable y est dans une situation plus difficile qu'au civil, où la procédure entièrement contradictoire place les parties sur un pied d'égalité.

Se pose alors la question de savoir, compte tenu de l'important arriéré judiciaire, laquelle des actions, civile ou pénale, doit prévaloir ?

L'administration soutient toujours que c'est la procédure pénale, et que l'action civile par laquelle un recours est exercé par les contribuables contre une taxation, doit donner lieu à un sursis à statuer jusqu'au jour où l'action pénale est tranchée.

Auparavant, la loi prévoyait explicitement le contraire, puisqu'elle obligeait la juridiction pénale à surseoir à statuer, mais cette disposition a été abrogée.

En pratique, c'est souvent la juridiction civile qui est amenée à trancher en premier lieu, parce que la procédure civile est moins lente que la procédure pénale, où la durée des instructions, notamment, retarde sensiblement le moment où l'affaire vient devant le tribunal.

Il arrive fréquemment que la juridiction civile estime qu'il n'est nullement indispensable d'attendre la fin de la procédure pénale pour trancher, parce que les questions ne sont pas toujours les mêmes.

Mais lorsqu'il s'agit des mêmes problèmes de droit fiscal, qui sont soumis à la fois à la juridiction pénale et à la juridiction civile, se pose la question de l'application éventuelle de la règle, devant la juridiction civile, "le criminel tient le civil en état".

On peut sérieusement soutenir que cette règle ne s'applique pas aux procédures fiscales.

Il en est quasiment certainement ainsi dans le cas où des sociétés, qui ne sont pas inculpées au pénal, par exemple parce que les faits sont antérieurs à 1999 (date de l'entrée en vigueur de la loi permettant la poursuite de sociétés au pénal), sont parties à l'instance civile.

La jurisprudence récente de la Cour de cassation exclut en effet qu'une décision, même rendue au pénal puisse être opposée à des personnes qui n'y sont pas parties, et ce en raison de la primauté des droits de la défense.

La règle de l'autorité "erga omnes" du criminel sur le civil est donc sérieusement mise en échec.

De plus fondamentalement, la loi se borne à prévoir l'obligation du juge civil de suivre la décision rendue au pénal (et donc, à fortiori, d'attendre que celle-ci soit rendue) dans tous les cas où il y a une action civile en réparation d'un dommage.

Tel n'est manifestement pas le cas lorsqu'il s'agit d'un recours contre un impôt, puisqu'il n'est là question, ni de dommage, ni de réparation de celui-ci.

Le plus souvent, le contribuable placé devant cette situation a donc intérêt à accélérer la procédure civile pour que celle-ci soit tranchée avant l'instance pénale.

Thierry AFSCHRIFT

Auteur : Thierry Afschrift

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