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La cotisation spéciale de 300% sur les commissions secrètes aux articles 10 et 11 de la constitution?

L'article 57 du CIR 1992 exige la production de fiches individuelles et de relevés récapitulatifs pour que certaines dépenses soient admises comme frais professionnels déductibles. Cet article vise notamment les honoraires, ristournes commerciales, courtages, commissions, indemnités, avantages en nature, etc. Le but de l'établissement de ces documents est de permettre à l'administration de contrôler la réalité du caractère effectivement déductible des charges invoquées par le contribuable et de vérifier que les bénéficiaires de ces "commissions " ont effectivement été imposés pour ces montants.

L'article 219 du CIR prévoit qu'à défaut de l'établissement de ces fiches individuelles et relevés récapitulatifs, peu importe que ces commissions, honoraires, etc. correspondent à des opérations réelles dont le contribuable peut apporter la preuve d'une autre manière que par la production de ces documents, le contribuable sera sanctionné par une cotisation spéciale distincte de 300% sur ces commissions qualifiées de secrètes.

Cette sanction paraît injuste et sévère pour les contribuables qui s'en voient frappés. En effet, la seule erreur commise par ceux-ci est souvent de ne pas avoir établi les fiches et relevés imposés par le CIR 92. Cette sanction paraît alors tout à fait disproportionnée.

Une congrégation religieuse a, à l'occasion d'un recours devant la Cour d'Appel de Liège, demandé à celle-ci de soumettre à la Cour d'Arbitrage une question préjudicielle relative à la cotisation spéciale de 300% sur les commissions secrètes.

La Cour d'appel de Liège a, dès lors, interrogé la Cour d'arbitrage sur la violation éventuelle par l'article 219 du CIR des articles 10 (égalité) et 11 (non-discrimination) de la Constitution.

Cette disposition ne fait, en effet, pas de distinction entre les catégories de personnes qui d'une part, faute d'avoir respecté à temps leurs obligations d'établir les documents requis dans les formes légales, empêchent effectivement voire volontairement l'administration de procéder à la taxation des bénéficiaires et d'autre part, ceux qui n'auraient pas empêché, voire voulu empêcher la taxation des bénéficiaires.

Par ailleurs, cette disposition aboutit à sanctionner le contribuable coupable d'une simple négligence, non seulement autant qu'un fraudeur ayant versé véritablement des commissions secrètes mais encore bien plus que le contribuable qui n'aurait pas rentré ses déclarations ou aurait rédigé une déclaration inexacte ou incomplète avec l'intention d'éluder l'impôt (accroissements d'impôt prévus par l'article 444 du CIR).

Un contribuable fraudeur se voit infliger un accroissement d'impôt limité à 50% pour la première infraction alors que dans le cas de l'article 219, pour une simple négligence qui pourrait être réparée par la suite, le contribuable se voit infliger une cotisation de 300%. En outre, ce taux de 300% est le taux le plus élevé de toute la législation fiscale.

La Cour d'Arbitrage n'a pas encore statué sur cette question et la réponse pourrait avoir un impact important sur la question des commissions secrètes. On peut espérer que la Cour reconnaîtra le caractère disproportionné de cette sanction.

Antonia BLOCK

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