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Commissions secrètes: une première brèche dans un système inique

Dans son numéro de mars 2000, IDEFISC se référait à un arrêt de la Cour d’appel de Liège qui, à la demande d’une congrégation religieuse, décidait de poser une question préjudicielle à la Cour d’arbitrage relative à la compatibilité de la cotisation spéciale de 300 % sur les commissions secrètes prévues à l'article 219 du Code des Impôts sur les Revenus avec les article 10 et 11 de la Constitution. La Cour d’arbitrage a statué sur cette question préjudicielle dans un arrêt du 6 avril 2000.

La Cour d’arbitrage a consulté les travaux parlementaires relatifs à l’article 219 du CIR dont il ressort que le législateur entendait combattre certaines formes d’abus et a établi une corrélation entre d’une part la déductibilité des montants de commission secrètes dans le chef de celui qui les paie et d’autre part, l’imposabilité de ces montants au nom des bénéficiaires.

La Cour considère que la lutte contre les fraudes, en décourageant la pratique des commissions secrètes, justifie une sanction fiscale dans le chef des contribuables qui commettent ces fraudes. Toutefois, la Cour indique qu’il convient que les mesures prises n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire à cette fin.

La Cour a examiné s’il était disproportionné d’appliquer cette mesure à des contribuables qui n’ont pas eu l’intention de soustraire une matière imposable à l’administration et dont la négligence n’a pas effectivement empêché celle-ci de procéder à la taxation des revenus dans le chef des bénéficiaires.

La Cour considère que la sanction de l’article 219 du CIR est lourde mais que ses effets sont atténués par la faculté qu’ont les contribuables assujettis de déduire le montant payé à titre de cotisations spéciales sur commissions secrètes de leur base imposable à titre de charge professionnelle.

Cependant, la Cour souligne que les personnes morales telles les ASBL, ne peuvent déduire cette cotisation spéciale étant donné que le montant d’impôt qu’elles doivent payer n’est pas calculé sur leurs bénéfices mais sur différents postes donnant lieu à des cotisations distinctes. Pour ces contribuables, il n’y a dès lors aucune atténuation de la mesure.

La Cour en conclut que la mesure prévue à l’article 219 est disproportionnée à l’égard des contribuables qui ne peuvent déduire la cotisation spéciale à titre de charge professionnelle et dont la négligence n’a pas mis l’administration dans l’impossibilité de procéder à la taxation dans le chef des bénéficiaires.

Cet arrêt est certes restrictif mais est un premier pas dans la reconnaissance du caractère disproportionné de la sanction que constitue une imposition au taux de 300 %.

Si la Cour considère que les mesures prises pour restreindre certains abus ne doivent pas aller au-delà de ce qui est nécessaire, elle aura dû tenir compte du fait que la cotisation spéciale de 300% peut avoir des conséquences très dommageables pour les contribuables qui sont tenus de la supporter. Elle peut apparaître tout à fait disproportionnée surtout lorsque ces contribuables n’ont pas eu l’intention de dissimuler des commissions.

Antonia BLOCK

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