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Un gérant peut effectuer des plus-values sur actions de sa société rentrant dans le cadre de la gestion normale d’un patrimoine privé

Le Tribunal de Première Instance de Bruxelles a rendu ce 16 février 2011 un jugement fort intéressant sur la question de la gestion normale d’un patrimoine privé lorsque l’intéressé exerce la fonction de gérant de société.

Pour rappel, en droit belge, les plus-values sur actions et parts réalisées par des personnes physiques sont exonérées d’impôt si l’opération tendant à la réalisation de celles-ci a lieu dans le cadre de la gestion normale d’un patrimoine privé (article 90.1° du CIR 92).

L’administration tente cependant souvent d’interpréter la règle précitée de manière trop large afin de soumettre à la taxation certaines opérations qui devraient normalement pouvoir être considérées comme entrant dans le cadre de la gestion normale d’un patrimoine.

Dans le cas soumis au Tribunal de Première Instance de Bruxelles, les fais de la cause étaient les suivants : il s’agissait d’un contribuable étant actionnaire de plusieurs sociétés dont il était également gérant, qui avait décidé de vendre ses participations à ses associés ou à leurs sociétés en vue de réduire son activité.

L’administration avait décidé de taxer les plus-values ainsi réalisées au titre de bénéfice ou profit occasionnel au taux de 33%, refusant donc d’appliquer le principe de l’exonération des plus-values obtenues dans le cadre de la gestion normale d’un patrimoine privé alors même qu’elle avait reconnu au préalable l’absence de spéculation en l’espèce.

En réalité, le seul point pouvant être réellement discuté portait sur la question de savoir si le fait que l’actionnaire vendeur « a toujours été jusqu’à la vente des actions, gérant des sociétés vendues » est compatible avec la notion de gestion normale d’un patrimoine privé.

Le Tribunal considère à cet égard que le seul fait que le contribuable ait été durant de nombreuses années le gérant des sociétés dont il a vendu les actions, et qu’à l’occasion des ces ventes, il a également cessé ses activités de gérances dans lesdites sociétés ne permet en rien d’établir que ce dernier se trouve automatiquement en dehors de la gestion normale d’un patrimoine privé pour la réalisation des opérations litigieuses.

Le Tribunal ajoute à ce propos qu’une telle interprétation serait contraire au principe du choix de la voix la moins imposée, en ce compris celui d’apporter son activité professionnelle en société.

De plus, en prétendant que l’exercice d’un mandat de gérant serait incompatible avec la gestion normale d’un patrimoine privé, l’administration pose une condition supplémentaire à l’exonération des plus-values réalisées sur actions et parts par une personne physique qui n’est nullement prévue par la loi.

Le Tribunal de Première Instance de Bruxelles relève par ailleurs que la thèse soutenue par l’administration conduit à méconnaître le principe de personnalité juridiques des sociétés vendues selon lequel il y a lieu de faire abstraction de tous les actes posés par l’intéressé en tant qu’organe des sociétés en question et donc de distinguer l’acte de vente des actions des autres activités exercées par ce dernier dans les sociétés vendues.

Enfin, le Tribunal émet certaines considérations sur ce qu’il convient d’entendre par « normal ». A son estime, le fait d’apporter une activité professionnelle en société relève justement de la normalité alors qu’à l’inverse, à savoir développer une telle activité sans en faire apport à une société est plutôt risqué et ne va pas dans le sens d’une gestion normale d’un patrimoine privé.

Ce jugement du Tribunal de première Instance de Bruxelles du 16 février 2011 doit être pleinement approuvé en ce qu’il confirme à juste titre qu’il existe aucune incompatibilité entre le fait de réaliser des plus-values sur actions de société dont un contribuable a été précédemment gérant et la notion de gestion normale d’un patrimoine privé et que dès lors, une telle opération doit être exonérée dans le chef du contribuable qui l’a effectuée.

Admettre le contraire reviderait en effet à violer les principes du choix de la voie la moins imposée et d’interprétation stricte des lois fiscales qui interdit à l’administration en l’occurrence de poser des conditions supplémentaires à une exonération d’impôt alors que celles-ci ne figurent nullement dans le texte légal, ce que le juge du Tribunal de Première Instance de Bruxelles a très bien relevé dans le jugement commenté.

Thème : Les plus-values

Auteur : Ronny Favel

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