ours-idefisc

Idefisc — Actualités fiscales

Auteur : Natacha Auvertin

En société, qui peut réclamer ?

La loi et les statuts règlent, en ce qui concerne les sociétés, les personnes ayant qualité, pour les représenter.

L’article 522 du Code des sociétés prévoit ainsi, à titre d’exemple, pour les sociétés anonymes, que le conseil d’administration représente la société à l’égard des tiers et en justice, soit en demandant, soit en défendant. Le même Code précise que la gestion journalière des affaires de la société, ainsi que la représentation de la société en ce qui concerne cette gestion, peuvent être déléguées à une ou plusieurs personnes.

En matière fiscale, le droit à réclamation est personnel au contribuable. C’est le redevable, c’est-à-dire la personne physique ou morale qui est reprise dans un rôle exécutoire, qui peut introduire une réclamation.

Le caractère personnel du droit à réclamation, ne fait toutefois pas obstacle à ce que le contribuable exerce ce droit par un mandataire. Dans cette hypothèse, la preuve du mandat doit être fournie à l’administration soit par le redevable, soit par le mandataire, sauf si celui-ci est un avocat.

Il arrive que le droit à réclamation d’une société soit exercé, non pas par le conseil d’administration de la société, ni par un mandataire habilité, mais directement par l’administrateur-délégué.

L’administration fiscale estime généralement dans cette hypothèse, que les réclamations introduites par l’administrateur-délégué, en cette qualité, ne sont pas recevables faute d’avoir été introduites par la ou les personnes physiques ayant qualité, en vertu des statuts ou de la loi, pour représenter la société (le conseil d’administration qui représente la société à l’égard des tiers et en justice). Elle est parfois suivie par une certaine jurisprudence. Cette position administrative ne peut, cependant, être généralisée.

Le 24 octobre 2002, la Cour de cassation a en effet confirmé que l’arrêt qui décide que les réclamations introduites au nom d’une société anonyme, par son délégué à la gestion journalière, ne sont pas recevables, sans rechercher si, eu égard à leur objet, ces réclamations ressortissaient à la gestion journalière, n’est pas légalement justifié.</p>

La Cour de cassation reconnaît donc qu’un recours fiscal peut être introduit par le délégué à la gestion journalière d’une personne morale, dans la mesure où le litige peut être considéré comme relevant de cette gestion.

Antérieurement, la Cour de cassation, dans un arrêt du 9 octobre 2000, avait déjà dit pour droit, au sujet de la personne compétente pour ester en justice, que si le litige à introduire s’inscrit dans la limite de la gestion journalière, le délégué à cette gestion est compétent.

Au contraire de ce qu’estime l’administration, la question de la compétence est donc à examiner au cas par cas, notamment au vu de l’importance du litige, de l’activité de la société, de la nécessité d’une prompte réaction,…

C’est ce qu’a décidé la Cour d’appel de Liège dans un arrêt du 15 septembre 2006 non encore publié. Selon la Cour, « la sauvegarde régulière des intérêts fiscaux de la firme dans les circonstances de la cause relève incontestablement de la gestion journalière ». Le litige mettait en cause une société spécialisée dans la publication de feuillets toute boîte, contre une taxe communale levée sur les écrits publicitaires. La Cour constate que la société tombait sous le coup de l’imposition dans de nombreuses communes. Elle contestait la perception de la taxe pour des questions de principe. Il s’ensuit, selon la Cour, « que les réclamations à formuler sont donc très nombreuses et que les sommes, si elles sont importantes au total, concernent des montants tout à fait réduits au coup par coup ».

Selon les circonstances, l’urgence peut également justifier la recevabilité de la réclamation, surtout lorsque le conseil d’administration ratifie ensuite expressément l’introduction de la réclamation signée par l’administrateur-délégué.

La jurisprudence abondante en la matière, nous permet de rappeler l’importance, dans une matière d’ordre public, d’être attentif à la compétence des organes exerçant le droit à réclamation de la société ou estant en justice.

Auteur : Natacha Auvertin
ours-idefisc
Idefisc — Actualités Fiscales
©2003-2020 Idefisc & Words and Wires W3validator