
Le 13 février 2025, le gouvernement wallon a adopté en première lecture un avant-projet de décret visant à ajuster la réforme de la fiscalité automobile, censée entrer en vigueur le 1ᵉʳ juillet 2025. Le texte doit encore être soumis au Conseil de la fiscalité et des finances de la Wallonie, puis au Conseil d’État, qui disposera de 30 jours pour rendre son avis.
Centrée sur la taxe de mise en circulation (TMC), cette réforme prétend moderniser la fiscalité en prenant en compte la puissance (kW), les émissions de CO₂, le poids et le carburant. À y regarder de plus près, elle se révèle pourtant parfois incohérente et contre-productive.
Contexte et objectifs
La première mouture de la réforme, adoptée le 6 septembre 2023, visait à « moderniser » la fiscalité automobile en Wallonie, sans pour autant repenser un système jugé obsolète par beaucoup. Le calcul de la TMC devait reposer sur plusieurs critères : la puissance, les émissions de CO₂, le poids et le type de carburant. Or, cette approche a suscité d’emblée de critiques, notamment pour son impact sur les véhicules électriques (alourdis par leurs batteries) et sur les familles nombreuses, souvent contraintes de choisir des véhicules plus spacieux.
Principaux ajustements
Analyse critique
1. Pénalisation persistante des véhicules électriques
Malgré l’allègement annoncé, la prise en compte du poids continue de gonfler la TMC, la rendant parfois plus élevée qu’auparavant. Par exemple, pour un Volkswagen ID.4 dont la TMC actuelle est de 61,50 €, le nouveau montant, initialement prévu à 601 €, serait ramené à 334 €. Cela représente tout de même une hausse notable, sans réel avantage face à certains véhicules thermiques ou hybrides. De même, la Hyundai IONIQ 6, actuellement taxée à 61,50 €, passerait à 1 223,34 € après application du coefficient énergie réduit (de 0,26 à 0,18). Même si cet ajustement fait baisser le montant initialement prévu de 1 767,04 € à 1 223,34 € (soit une économie de 543,70 €), on reste sur une augmentation de 1 161,84 € par rapport à la taxe actuelle.
2. Traitement avantageux pour certains hybrides ou diesel
Paradoxalement, certains modèles hybrides ou diesel bénéficient d’une TMC fortement réduite (parfois divisée par 10), alors même que leur impact environnemental n’est pas négligeable. Ainsi, la BMW Série 3 hybride rechargeable, autrefois taxée à 1 239 €, ne serait plus soumise qu’à 109 €. Cette disparité questionne la logique écologique poursuivie.
3. Complexité du calcul de la TMC
En intégrant de multiples variables (CO₂, poids, puissance, carburant), la nouvelle formule devient difficile à comprendre pour les automobilistes, générant confusion et insécurité fiscale.
4. Impact limité pour les familles nombreuses
Si la réduction grimpe à 250 €, elle demeure anecdotique face à des TMC qui peuvent dépasser le millier d’euros, surtout pour les véhicules familiaux plus grands. De plus, la mesure ne s’applique qu’à un seul véhicule par foyer, alors que certains ménages doivent en utiliser plusieurs.
5. Risque d’inégalités sociales
L’accent mis sur le poids et la puissance peut pénaliser les foyers à revenus modestes, souvent contraints d’acheter des véhicules plus anciens et potentiellement plus polluants. Cette réforme pourrait donc creuser davantage les inégalités en matière de mobilité.
Conclusion
Si la réforme wallonne de la fiscalité automobile veut encourager l’électrification et soutenir les familles, elle s’avère entachée de contradictions : calcul complexe, pénalisation persistante des véhicules électriques, traitement avantageux pour certains hybrides ou diesel et faible soutien aux ménages les plus vulnérables.
Le gouvernement a mentionné un coût supplémentaire de 4 millions d’euros pour mettre en place ces ajustements. Était-il toutefois pertinent de se concentrer uniquement sur la TMC ? Une refonte globale, cohérente et mieux alignée sur les objectifs climatiques aurait sans doute été plus judicieuse…
Alexis HEYNDERICKX