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Idefisc — Actualités fiscales

Auteur : Danièle Cohen

Listing de fraudeurs acheté par l’Allemagne…le retour ?

Il y a quelques semaines, le gouvernement allemand a décrété vouloir acheter pour 2,5 millions d’euros, une liste de fraudeurs dissimulant leurs avoirs en Suisse qui aurait été dérobée à la banque HSBC.

Cette liste contenue sur un CD comprendrait le nom de 1500 ressortissants allemands ayant des comptes cachés en Suisse.

Le ministre des Finances allemand a concomitamment encouragé les fraudeurs à se dénoncer spontanément.

Cette initiative n’est pas sans rappeler une affaire similaire, où en 2008 le fisc allemand avait acheté une liste de fraudeurs ayant des comptes au Liechtenstein.

Qu’en est-il du recueil de ces informations par le fisc belge ?

Le cabinet du ministre des Finances a officiellement déclaré vouloir demander ces informations à l’Allemagne.

La première interrogation qui se pose est le procédé d’obtention des données. En effet, pour pouvoir les utiliser, elles devront être obtenues de manière régulière en respectant les prescrits légaux : ce qui en exclut l’achat.

Il n’y a toutefois, à l’heure actuelle, aucune disposition dans la convention préventive de double imposition conclue le 11 avril 1967 entre l’Allemagne et la Belgique qui prévoit l’échange d’informations bancaires.

Autre question : une fois en possession de ces données, le fisc belge pourrait-il utiliser ?

Il faut distinguer deux hypothèses :

Dans le cas où les informations auraient été obtenues régulièrement et légalement, le fisc pourrait les utiliser.

Compte tenu du fait que le fisc allemand a acheté des informations volées, il faudrait toutefois se demander si cette opération ne constituerait pas un recel au sens du droit pénal (Art. 505CP « Seront punis d'un emprisonnement de quinze jours à cinq ans et d'une amende de vingt-six francs à cent mille francs ou d'une de ces peines seulement : 1° ceux qui auront recelé, en tout ou en partie, les choses enlevées, détournées ou obtenues à l'aide d'un crime ou d'un délit (…) »).

Il faut néanmoins garder à l’esprit que l’utilisation de données régulièrement récoltées avait permis au fisc belge de récupérer 1,57 millions d’euros dans l’affaire similaire de listings provenant du Liechtenstein.

Dans l’hypothèse où la Belgique achèterait les informations à l’Allemagne, la situation nous ramènerait à la saga KB-Lux où la stratégie d’utilisation d’informations volées n’a pas été fort fructueuse pour le fisc belge.

Néanmoins, même si l’utilisation des informations au stade judiciaire était de nul effet, cette pratique aurait pour conséquence d’encourager la dénonciation volontaire des fraudeurs.

En Allemagne, le fisc affirme que la simple rumeur a poussé un grand nombre de personnes à se dénoncer spontanément. Bluff ou réalité …?

Cette situation soulève diverses questions.

L’attitude de l’Etat belge est-elle acceptable ?

En encourageant l’achat d’informations volées, l’Etat respecte-t-il ses principes de bonne administration ?

En recelant des informations volées, le principe de l’Etat de droit est-il vraiment respecté ?

Informations achetées ou simplement communiquées, le comportement du fisc belge est condamnable sur le plan des principes.

Auteur : Danièle Cohen
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