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Idefisc — Belastingsnieuws

Auteur : Natacha Auvertin

Article 90,9° cir contraire au traité de Rome

Dans un précédent article, nous vous faisions part de la compatibilité plus que douteuse de l'article 90, 9° du CIR avec les exigences du droit européen. Particulièrement, l'article 90, 9° du CIR est incompatible avec les notions de liberté d'établissement et de libre circulation des capitaux, telles que les applique la CJCE.

Le principe est le suivant. Lorsque qu'une personne physique réalise, en dehors de son activité professionnelle, une plus-value sur une cession d'actions, qu'il s'agisse ou non d'une participation importante, aucun impôt n'est pas dû, si elle reste dans les limites de la gestion normale du patrimoine privé.

L'article 90, 9° du CIR qualifie, toutefois, de revenus divers (taxables au taux de 16,5 %) les plus-values réalisées à l'occasion de la cession d'une participation importante - ou qui fut importante à un moment quelconque au cours des cinq dernières années précédant la cession - détenue dans une société belge, lorsque la cession s'opère au profit d'une personne morale étrangère.

L'article 90, 9° CIR consacre donc une différence de traitement consistant à refuser au cédant l'avantage fiscal d'une exonération sur la plus-value réalisée lorsque les actions sont cédées à une personne étrangère.

Cette différence de traitement est manifestement contraire au droit communautaire.

La privation de l'avantage fiscal, au motif que la société cessionnaire est étrangère, constitue une restriction aux mouvements de capitaux entre les Etats membres, puisque l'assujetti personne physique belge est dissuadé de céder sa participation à une société étrangère, en raison de la taxation prévue à l'article 90, 9°.

Nous prenions pour appui, notamment, les conclusions de l'avocat général près la CJCE condamnant une prescription comparable de la législation suédoise.

Le 21 novembre 2002, la CJCE a confirmé, en droit, l'avis de l'avocat général.

Selon l'arrêt de la Cour de justice européenne du 21 novembre 2002, en cause X-Y, 436/00 : " Est contraire à la liberté d'établissement ou de libre circulation des capitaux, selon le cas, la loi suédoise qui soumet les plus-values afférentes à des participations à un régime fiscal plus onéreux lorsque les participations sont cédées à une personne morale étrangère plutôt qu'à une personne morale suédoise ".

Cet arrêt condamnant la Suède est particulièrement important pour la Belgique en raison de l'analogie du régime suédois avec la taxe sur les cessions de participations importantes de l'article 90, 9° du CIR 92.

Dans les deux cas en effet, la législation nationale prévoit un traitement spécial (défavorable) uniquement lorsque la cession a lieu au profit d'une personne morale étrangère, et donc uniquement en raison du lieu d'établissement et donc de la nationalité du cessionnaire.

En l'espèce, l'article 90, 9° du CIR 92 est une mesure qui s'applique de toute évidence en cas de mouvements de capitaux entre les Etats membres, puisqu'il vise précisément la cession d'une participation importante par un résident personne physique d'un Etat membre au profit d'une société établie dans un autre Etat membre.

En outre, admettre que la Belgique puisse refuser le bénéfice de l'exonération d'impôt sur les plus-values réalisées à la suite de la cession d'une participation importante, privant ainsi le cédant d'un avantage fiscal, au motif que le siège de la société cessionnaire est situé dans un autre Etat membre, vide la liberté d'établissement de son contenu.

La charge imposée au vendeur influence négativement la situation de l'acheteur , de sorte que le traitement différentiel pour le vendeur implique une restriction aux mouvements de capitaux entre les Etats membres, au sens de l'article 56 du Traité CE. L'article 90, 9° du CIR constitue en effet une mesure tendant à dissuader des assujettis à l'impôt des personnes physiques de céder une participation importante qu'ils détiennent dans une société belge à une société établie dans un autre Etat membre, puisque dans cette situation, ils sont privés du bénéfice de l'exonération de la plus-value réalisée. Cette mesure constitue non seulement à l'égard de l'assujetti personne physique belge, mais également à l'égard de l'assujetti société étrangère une restriction à la liberté de mouvements des capitaux.

La discrimination établie sur base de la nationalité de la société cessionnaire est non pertinente. Cette entrave à la liberté de circulation des capitaux ne peut se justifier au regard des motifs avoués par la législation belge de 1984 (suppression de la taxation lorsque la cession s'effectue au profit d'une société belge) de faciliter l'accès en bourse.

C'est une loi de 1976, complétée par une loi de 1977, qui a soumis à l'impôt des personnes physiques, au titre de revenus divers taxables à 16,5 %, les plus-values réalisées par une personne physique sur des actions ou parts belges, lorsque, dans les cinq années précédant la vente, cette personne physique et son groupe familial ont détenu ensemble plus de 25 % des parts de la société et que l'acheteur est lui-même une société, soit belge, soit étrangère.

La loi de 1976 ne prévoyait, à l'origine, que la taxation des plus-values lorsque la cession était effectuée au profit d'une personne morale belge. Ce n'est que par une loi de 1977, que le législateur a rendu la règle applicable aux ventes à des sociétés étrangères dans le but d'éviter certains abus.

Une loi de 1984 - dite de redressement - a supprimé l'imposition des plus-values réalisées lors de la vente d'actions uniquement dans l'hypothèse où l'acquéreur est une société belge, au motif tout à fait contestable de faciliter l'accès en bourse.

L'exclusion est dès lors d'autant plus inacceptable, sur le plan communautaire, que c'est pour des raisons de lutte contre l'évasion fiscale que les cessions des participations importantes à des sociétés étrangères furent ajoutées en 1977 dans le champ d'application de l'article 90, 9° du CIR 92.

Parce que les Etats membres doivent exercer leur compétence en matière de fiscalité directe dans le respect du droit communautaire, l'article 90, 9° du CIR 92 ainsi que toute taxation qui en serait la conséquence, sont, selon nous, manifestement illégaux.

Auteur : Natacha Auvertin
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