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Amendes fiscales excessives et intérêts exorbitants: que faire?

Suite à un contrôle fiscal, l'administration vous a infligé, outre les intérêts sur les sommes éludées, des amendes qui vous semblent disproportionnées par rapport à l'infraction commise. Elle vous a, par exemple, infligé une amende de 100% du montant de la TVA éludée parce que vous avez déduit la TVA sur la base de factures non conformes. Le montant de l'amende est légal, mais d'après vous, disproportionné car les prestations étaient réelles et vous étiez de bonne foi.

Devez-vous vous incliner docilement devant une sanction administrative ou un refus ministériel de remettre ou de réduire la sanction ? Ou pouvez-vous contester devant le juge, non pas la légalité de ces amendes et intérêts qui n'est pas mise en doute, mais bien l'opportunité de ceux-ci au vu des circonstances propres à votre cas ?

La jurisprudence de la Cour de cassation, antérieure à la réforme fiscale, limitait le pouvoir d'appréciation du juge à la légalité de l'amende et à sa conformité aux principes généraux de droit ainsi qu'au devoir de prudence auxquels est soumise l'administration.

Depuis la loi de réforme de la procédure fiscale du 23 mars 1999, le tribunal de première instance connaît de toutes les " contestations relatives à l'application d'une loi d'impôt " (art. 569, al. 1, 32° du Code judiciaire).

De cette manière, le législateur a expressément accordé au tribunal de première instance le pouvoir de statuer en pleine juridiction sur toutes les contestations relatives à l'application d'une loi d'impôt, et par conséquent notamment sur les amendes fiscales.

En conséquence, puisque le directeur des contributions ou le Ministre des Finances ont le pouvoir de statuer en opportunité en tenant compte des faits et des circonstances du litige, les Cours et tribunaux disposent également de ce pouvoir d'appréciation en opportunité.

Le tribunal de première instance de Mons a rendu le 15 juin 2000 le premier arrêt postérieur à la nouvelle procédure fiscale, constatant que les cours et tribunaux sont compétents pour juger de l'opportunité des amendes fiscales. Il a de même estimé qu'ils sont également compétents pour juger de l'opportunité des intérêts encourus.

Concrètement, quelles sont les " circonstances atténuantes " que vous pouvez invoquer devant le juge ?

Le principal argument à avancer afin d'obtenir la réduction des amendes est bien entendu la bonne foi du contribuable. Par exemple, celui-ci a déduit la TVA sur la base de factures non conformes, mais les opérations ont été réellement prestées et le prix effectivement payé. Ou encore, le contribuable n'a pas déclaré des revenus qu'il avait perçus, non pas dans l'intention d'éluder l'impôt, mais parce qu'il croyait que ces revenus n'étaient pas imposables.

Les éventuelles difficultés financières du contribuable pourront également être prises en considération par le juge, du moins si ces difficultés sont dues à des circonstances indépendantes de sa volonté.

Un autre argument à invoquer est le fait que le Trésor n'est pas en péril car le principal a été payé.

Enfin, il est également possible de soutenir que les amendes infligées sont disproportionnées par rapport à la faute commise. Ainsi, infliger une amende égale à 200% de la TVA éludée, comme le permet l'article 70 du Code de la TVA, peut être excessif dans certains cas.

Le juge appréciera l'ensemble des circonstances atténuantes pour juger s'il est opportun de réduire l'amende. Ainsi, le tribunal de première instance de Mons a décidé de remettre partiellement les amendes pour les raisons suivantes : le contribuable était malheureux et de bonne foi; sa situation obérée était indépendante de son fait; ses efforts pour s'acquitter de sa dette fiscale en principal ont été importants; sa situation familiale était précaire ; les intérêts du Trésor n'étaient plus en péril, le principal ayant été payé; le contribuable n'avait pas choisi l'aveu de faillite dans le cadre de laquelle il aurait pu spéculer sur l'excusabilité et sur la suppression de tout passif.

Le tribunal de première instance de Mons a tenu le même raisonnement en ce qui concerne les intérêts dus sur la TVA éludée. Il rappelle que certes " il n'appartient pas au Trésor de supporter les conséquences financières de la gestion d'entreprise d'un tiers, fut-elle malheureuse ".

Toutefois, il estime en l'espèce que " le requérant s'est vu appliquer un mode de calcul des intérêts sur sa dette particulièrement pénalisant […] qui aboutit à un emballement des intérêts qui est d'autant plus amplifié que les payements effectués par le redevable sont de peu d'importance ".

En conséquence, si vous estimez les amendes infligées ou les intérêts encourus trop élevés et que ni l'administration fiscale, ni le Ministre n'entendent réduire ces amendes et intérêts, adressez-vous au juge qui sera peut-être plus enclin à prendre en compte vos circonstances atténuantes…

Valérie-Anne de BRAUWERE

Auteur : Valerie-Anne de Brauwere
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