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De nouveaux rulings....empoisonnés

Dans la précipitation qui précède les élections, le gouvernement a fait paraître un arrêté royal portant, non plus sur les « avis préalables » mais sur les « décisions anticipées » en matière fiscale.

Il permet d'obtenir d'une cellule, distincte de celle compétente pour les accords fiscaux préalables, une « décision anticipée » pour une série de matières limitativement énumérées.

Il s'agit d'abord des incidences en matière d'impôt direct et indirect d'un investissement en immobilisations corporelles ou incorporelles, en ce compris, leur financement. Il semble que cela couvre même les conséquences de normes comptables, et en particulier le rythme d'amortissement.

Peut également faire l'objet d'un nouveau ruling, le mode de facturation des services prestés par une société belge qui se livre à des activités préparatoires auxiliaires ou à certaines activités d'information non commerciale à sa clientèle.

Il en est de même pour des sociétés exerçant des activités d'intervention administratives, dans les ventes, à l'intérieur d'un groupe.

Des questions peuvent également être posées sur les incidences fiscales sur les revenus des membres du personnel spécialisés ou affectés à la recherche scientifique ainsi qu'au nombre du personnel d'encadrement qu'une société affecte temporairement au fonctionnement d'un investissement ou à la réévaluation d'une activité pour laquelle une décision anticipée peut être demandée.

Enfin, l'administration peut être interrogée sur l'existence d'un avantage anormal ou bénévole au sens de l'article 26 du Code, ou de la réunion par un paiement prévu par l'article 54 du Code, des opérations réelles ou sincères qui ne dépassent les limites normales.

Les décisions ainsi rendues lieront l'administration, si les conditions fixées sont respectées, si les activités exercées correspondent à celles demandées, si les activités ont été exposées d'une manière complète et exacte (ce qui laisse évidemment la marge à une certaine appréciation), et si les effets des opérations ne sont pas modifiés par des opérations ultérieures (ce qui laisse la place à toute discussion).

L'expérience désastreuse de la commission des accords fiscaux préalables, dont la jurisprudence plus que chaotique relève dans certains domaines, notamment en matière de scission de sociétés, de l'incompétence pure et simple, n'incite pas à utiliser abondamment cette nouvelle possibilité d'obtenir un accord préalable, avec l'administration.

Certes, un des inconvénients de cette structure est quelque peu atténué, puisque les délais pour obtenir en principe une décision passent de trois mois à un mois.

Il n'empêche que l'entreprise qui demandera un avis dans ces conditions ne sera pas tout à fait certaine que le fisc est réellement lié, eu égard au caractère flou des conditions qui y sont mises. En revanche, en cas de refus de l'administration, elle saura qu'il y a risque important à réaliser l'opération, parce qu'elle se sera auto dénoncée auprès de l'administration.

Nous avons, dans ces colonnes, plusieurs fois critiqué le système des rulings, qui a pour conséquence, même là où ils fonctionnent bien, de transformer le droit fiscal, qui est à base légale, en une construction essentiellement administrative. A supposer que les contribuables demandent massivement des ruling, on en arrivera rapidement à ce que l'essentiel de l'actualité fiscale soit composé de décisions administratives.

L'administration pourra alors en tirer un argument pour faire rédiger des textes légaux d'une manière extrêmement large, en disant que toute manière, elle appréciera les situations concrètes sur la base de demande de ruling. Ce jour-là, le rêve administratif sera réalisé : partant d'un système ou tout ce qui n'est pas interdit est permis, on sera arrivé à un système où tout sera interdit, sauf ce que l'administration aura expressément autorisé ...

Thierry AFSCHRIFT

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