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Exigence de substance pour une société holding

1. La jurisprudence relative au problème de substance pour la constitution d’une société holding continue à se développer, à la faveur de décisions parfois fort intéressantes, mais malheureusement souvent défavorables au contribuable

Récemment, la Cour d’appel d’Anvers a été amenée à examiner cette problématique qui a donné lieu à un arrêt de la Cour du 28 janvier 2025.

Les faits soumis à l’appréciation de la Cour d’appel sont les suivants : en 2013 une société holding est constituée en partie par apport d’actions d’une société d’exploitation. Une réduction de capital a lieu 4 ans plus tard.

Ce remboursement de capital s’intégrait dans le cadre d’un montage de « plus-value interne » (apport d’actions à une holding, suivi par une distribution de dividendes à la holding et une réduction de capital par la holding à l’actionnaire particulier).

Des écritures donnèrent lieu à l’inscription d’une créance au compte courant. Ensuite, un certain montant du compte courant fut transféré au compte courant de la société filiale qui avait été apportée. En conséquence, la dette de la holding envers les actionnaires fut réduite à concurrence de ce montant et une nouvelle dette fut créée envers la société apportée pour le même montant.

Au sein de la société d'exploitation une créance contre la holding fut enregistrée pour ce montant, qui a été compensée par les créances en cours de la société d’exploitation contre les actionnaires pour ce même montant.

L’Etat belge était d'avis que l'ensemble des opérations juridiques susmentionnées n'avait pour finalité que de permettre aux actionnaires de régler leurs dettes personnelles dans la société d'exploitation en exonération d’impôt et par le biais d'un ensemble complexe d'opérations. Il taxa la réduction de capital intervenue comme une distribution de dividendes en invoquant l’abus fiscal visé à l’article 344, paragraphe 1 du code des impôts sur les revenus.

2. Sur la base des éléments qui lui sont exposés, la Cour d’appel d’Anvers estime qu’ il est établi qu'une construction fiscale a été mise en place par laquelle les liquidités de la société d'exploitation, qui étaient au moins en partie déjà mises à la disposition des actionnaires avant la création de la société holding, ont été attribuées aux requérants en appel en franchise d'impôt en tant que capital libéré, alors qu'elles auraient normalement dû faire l'objet d'une distribution de dividendes.

En l'espèce, selon la Cour, il y a un appauvrissement manifeste de la société, en ce sens que les liquidités/réserves qui ont été constituées dans la société d'exploitation sont utilisées pour financer la réduction de capital de la holding. Il serait donc établi que la société a agi en contradiction avec l'objet et le but de l'article 18, alinéa 1er, 1° du code des impôts sur les revenus. Sans les actes juridiques successifs, si les dividendes avaient été payés directement aux demandeurs en appel, ils auraient été imposables en application de l'article 18, alinéa 1er, 1° du code des impôts sur les revenus.

Pour arriver à cette conclusion, la Cour prend en compte certains éléments dont :

  • La constatation que la société holding n'avait pas de moyens financiers propres pour financer la réduction de capital ;
  • Le fait que la société holding est passive (aucune liquidité n'est détenue pour exercer une activité réelle, aucune rémunération n'est versée aux administrateurs...) ; ses revenus proviennent des dividendes générés par la société d’exploitation. Il n'apparaît nullement qu'elle aurait des revenus provenant de missions de conseil.

La preuve de l'abus fiscal ayant été apportée, il appartient au contribuable de démontrer qu'il existait d'autres motifs pour réaliser l’acte juridique ou l'ensemble d'actes juridiques, que l'évitement de l'impôt.

La Cour estime que cette preuve n'est pas fournie en l’espèce. Le fait que la société holding ait été créée pour des raisons commerciales, ainsi que pour des raisons familiales non fiscales n’est pas prouvée en l’espèce.

La Cour avalise ainsi la thèse de l’Etat belge qu’elle estime être en droit de taxer la réduction de capital en tant que distribution de dividendes sur la base de l’abus fiscal.

3. Cet arrêt de la Cour d’appel d’Anvers montre l’importance, dans le cadre d’une opération d’optimisation fiscale, de pouvoir justifier l’utilisation d’une société holding par des motifs autres que fiscaux.

Il est, à cet égard, nécessaire de pouvoir doter la société holding d’une certaine substance économique et de pouvoir la documenter, comme la détention de plusieurs participations ou le réinvestissement d’une partie des dividendes reçus ou la mise en place d’une planification successorale.

Auteur : Angélique Puglisi
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